Vallemolen
Valmolen
rue Charles Ramaekers
op de Molenbeek
nabij de monding van de Heizelbeek
1,2 km NW v.d. kerk
kadasterperceel C47
De Vallemolen of Valmolen was een watermolen op de Molenbeek, nabij de monding van de Heizelbeek, die voor 1517 opgericht werd. De molen maakte deel uit van de heerlijkheid van Ter Plast en werd in 1517 bewoond door herbergier Jan Kemmer.Hij staat afgebeeld op de Ferrariskaart (ca. 1775) als "Val Molen" en op een kaart van 1836 als "Valle Molen".
Eigenaars na 1830:
- voor 1834, eigenaar: de Villegas, graaf Pierre, eigenaar te Jette
- 08.05.1874, verkoop: Lemmens Gustavus, ingenieur te Sint-Joost-ten-Node (notaris Scheyven)
In 1866 werd een stoommachine geplaatst, maar er werd ook nog met waterkracht gemalen. In 1887 veranderde de molen in een woonhuis.
Op een ander plan van 1891 was het molengebouw aangeduid als "laiterie de l'ancien moulin". Later werd het gebouw een landelijke dansgelegenheid. tot de sloop in 1904.
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Le Valle molen ou Valmolen était un moulin à eau le long du ruisseau Molenbeek. Il apparait déja sur le plan de Ferraris de 1777 (Val Molen).
On trouve encore mention du moulin (Valle Molen) sur un plan de 1836.
Sur un autre plan de 1891, le moulin a disparu et il est indiqué laiterie de l'ancien moulin.
Robert Van den Haute, "A deux pas de Jette. Le Valmolen à Laeken", in: Ons Graafschap. Jaarboek van de Geschied- en Heemkundige Kring van het Graafschap Jette en Omgeving, X,1973, p. 33-41.
Durant des années le Molenbeek a fait tourner trois moulins en territoire laekenois (1); ainsi, vers 1570, en quittant Jette, on rencontrait successivement le Valmolen, le Keizersmolen et le Sweerts- ou Cammemolen. C'est l'histoire du premier d'entre eux qu'on va lire ci-après.
L'emplacement du moulin est bien connu du fait qu'il ne devait tomber sous la pioche des démolisseurs qu'au mois de juillet 1904 lorsque furent aménagés les abords du boulevard Emile Bockstael, ouvert depuis peu. L'usine à moudre le grain occupait le carrefour formé de nos jours par les rues Charles Ramaeckers et Alfred Stevens.
Son iconographie est - pour ce que nous en avons retrouvé - fort pauvre. Il y a d'abord un dessin d'Emile Puttaert portant la mention autographe de l'artiste" A Jette - 26 avril (18)60"; cette localisation erronée est cause que d'aucuns ont cru qu'il s'agissait du moulin que l'abbaye de Dielighem possédait sur le Molenbeek, à Jette, à la sortie de l'actuel Institut du Sacré-Cœur (2).
Il y a ensuite une photo prise par Arthur Cosyn en 1904 (3), juste avant la démolition de l'usine, photo qui permet précisément de rectifier la souscription du dessin de Puttaert; la similitude entre les deux documents ne permet pas de doute. L'erreur de l'artiste est bien pardonnable lorsqu'on songe que le moulin se trouvait à quelques pas seulement de la limite Jette-Laeken.
Les deux documents précités ont été pris du même côté, c'est-à-dire qu'ils nous donnent tous les deux le pignon oriental du moulin. Chez Puttaert toutefois on distingue la façade du bâtiment en bordure de la rivière dont l'annexe à laquelle on accédait par un ponceau, annexe qui n'existait plus lorsque Cosyn photographia l'usine.
Les cartes et plans consultés - ne remontant pas au delà du 18e siècle - ne donnent que le tracé extérieur de l'ensemble.
Chez Ferraris (1771-1778) on voit un rectangle dont un des petits côtés s'appuie au ruisseau. La carte manuscrite de G. de Wautier (vers 1810) donne le même dispositif mais agrandi: un petit avant-corps est venu se greffer sur la façade principale, celle qui s'ouvrait vers l'est et où aboutissait le bout de chemin mettant le moulin en communication avec la route allant de Molenbeek Saint-Jean à Meysse. D'autres annexes furent accolées ultérieurement ainsi que le montre le dessin de Puttaert où l'on voit à l'avant-plan un grand hangar en planches où on abritait probablement les chariots eu autres véhicules.
Il y a aussi les plans cadastraux de Vandermaelen (1835) et de Popp (vers 1865) (4) qui indiquent fort peu de changements sauf la construction de quelques annexes derrière le moulin proprement dit.
Mals l'usine représentée sur les documents dont il vient d'être question n'était par la première à avoir moulu du grain en ce site.
Un acte de 1672 appelle péjorativement le moulin creupelmoelen c'est-à-dire insuffisant, ne répondant pas à ce qu'on était en droit d'en attendre. Il avait probablement pas mal d'années derrière le dos et de plus, devait avoir souffert des vicissitudesdu temps. Ne l'oublions pas, à chaque siège ou menace de siège de la ville de Bruxelles, le Magistrat faisait détruire ou incendier les mou lins et maisons de quelque importance de la périphérie de la cité pour empêcher que l'assaillant n'en fasse usage. De même, un assaillant qui se retirait bredouille, se livrait également aux mêmes actes de vandalisme. Or, la région qui nous intéresse a vu passer et repasser combien d'armées sans oublier les bandes irrégulières qui adoptaient les mêmes tactiques. Songeons seulement aux 16e et 17e siècles qui sont marqués d'un point noir dans notre histoire nationale.
C'est probablement à la suite de ces événements que le Valmolen se sera trouvé, lui aussi, en très mauvaise posture au point de se voir décocher le nom de creupelmolen (5). Fort heureusement, ajoute ce même document de 1672, le moulin avait été depuis rénové complètement au point de devenir un rechtenmolen répondant à tous les desiderata. Et de fait. c'était maintenant un moulin double comptant deux roues à palettes actionnant l'une, un moulin à blé (corenmolen), l'autre servait à moudre le seigle (roggemolen). Ce dispositif n'avait rien d'exceptionnel; dans la région bruxelloise on en rencontrait beaucoup. A Schaerbeek, par exemple, il y avait deux usines de ce type à peine distantes d'un kilomètre l'une de l'autre. La nécessité de produire davantage découlait de l'augmentation du chiffre de la population non seulement dans les villages des servis mais surtout dans la capitale, ce qui nécessitait un rendement accru.
Les documents contemporains précisent qu'au Valmolen il y avait tweebuitenraderen (roues à palettes), twee binnenraderen (leurs pendants à l'intérieur du bâtiment), twee molenboomen (deux arbres moteurs) en twee gestellen (bâtis Intérieurs comportant entre autres chacun une lanterne, une paire de meules, etc.) (6).
De rester des années dans l'élément liquide et d'être soumis à toutes les intempéries, les installations extérieures - celles en bois surtout - se détérioraient rapidement et il fallait régulièrement procéder à leur renouvellement. Ainsi, pour ne donner qu'un exemple, une grande partie du barrage dut être remplacée parce que, dit le document, il était "door Oudheid van tljde verrot en vervallen". (7).
Comme l'indique son nom, le moulin avait une val ou chute.C'est à dire qu'il était du type qu'on rencontrait le plus dans la région bruxelloise où les ruisseaux n'étaient guère rapides à cause du peu de pent.
Le problème de leur débit et la recherche des moyens à mettre en œuvre pour, nonobstant cet handicap, produire la force motrice indispensable à la mouture, furent toujours des plus préoccupants. Pour faire tourner son «moteur" à la vitesse voulue pour pouvoir moudre un maximum, le meunier cher chait à retenir l'eau, à la faire monter le plus haut possible afin qu'elle puisse tomber avec le plus de polos sur sa roue à palettes. Il obtenait cela grâce à l'établissement d'un barrage muni de vannes qu'on levait ou descendait suivant le niveau désiré.
Mais,si cela profitait au meunier qui se, livrait ' à cette opération, cela pouvait ipso facto nuire aux deux moulins à voisins, celui en amont et celui en aval. Ces excès en la matière suscitèrent bien des inimitiés, des disputes, de querelles. Nous connaissons un cas, à Schaerbeek, où un meunier, obsédé pa les manœuvres de son confrère en amont, 'alla tuer celui-ci à coups de fourche' (8).
Quels étaient, à vrai dire, les inconvénients qu'entraînait le fait de «serrer l'eau. comme on disait?
Le moulin en aval ne recevait plus la quantité minimum d'eau nécessair pour faire tourner convenablement son usine tandis que le voisin enamor voyait l'élément liquide stagner devant son barrage et surtout à hauteur des chute et de sa roue à palettes. Le résultat est qu'il se formait, devant cette dernière, des dépôts de terre, de sable, d'herbes, de branchettes et autre débris; aussi devait-on souvent aller désembourber ladite roue, ce qui se solda par des heures voire des jours de chômage.
Pour mettre fin à de tels abus, la Chambre des Tonlieux de Bruxelles ava édicté des règles sévères et prévu de lourdes amendes à charge des contrevenants (9). On détermina la hauteur maxima que l'eau pouvait atteindre au barrage de chaque moulin et cela parun clou de juge (pegel) scellé dans le dispositif, opération qu'on confiait aux waeterschatters de ladite Chambre. De: inspecteurs de cettemême autorité sillonnaient à longueur d'année dans nos régions pour surprendre les meuniers qui feignaient d'ignorer la présence d ce clou et faisaient jouer leurs vannes au mieux de leurs intérêts égoïstes.
Rappelons que le barrage comportait deux compartiments verticaux et en faisant qu'un à première vue: celui juste en face de la roue à palettes par lequel l'eau passait pour tomber sur la dite roue était la vanne d'abé tandis que l'autre comportait les glissières qu'à volonté on hissait ou abaissait pour laisser s'écouler l'eau non employée.
Le clou de jauge du Valmolen se trouvait, à la fin du 17e siècle, l'usine étant en repos, à 6,5 pouces au-dessus du plan d'eau (10); quant à la chut! elle avait une hauteur de 9 pieds 8 pouces. Ledit clou qui s'ornait met S.M Bourgeoins cruys (11) dut être replacé et renouvelé plus d'une fois. Cela se faisait à la demande des propriétaires et meuniers ou d'office par les Waeterschalters précités et toujours en présence des autorités locales.
Nous ne connaissons pas les dimensions de roues à palettes de notre moulin, nul document n'en fait état. Comme partout dans nos régions, les roues proprement dites auront été en chêne tandis que les palettes étaient le plus souvent en bois de frêne. A examiner le dessin de Puttaert, il semblerait que la largeur de la roue équivalait au tiers de sa hauteur.
A chaque changement de locataire, le propriétaire - souvent représenté par un notaire - et le candidat-preneur faisaient le tour de l'installation et actaient la valeur de toutes les parties de celle-ci. Cela nous vaut quelque détails à propos des meules dont la valeur était fonction de leur épaisseur En 1729, on note que, pour le corenmolen, le liggende steen (la meule inférieure dite gisante parcequ'elle ne bouge pas) avait 7,5 pouces d'épaisseur et le loopende steen (la supérieure dite courante) 12 5/8 pouces. Pour le langher molen (celui pour moudre le seigle) la supérieure mesurait 12 1/4 pouces de hauteur tandis que pour la gisante on note "is niet meetbaer" sans qu'on dise pourquoi (12).
En 1742, même opération. Cette fois on lit pour le corenmolen: la gisante à 6 pouces, la courante 11 7/8; pour le langhen molen: la gisante 3 1/8 et la courante 7 7/ 8. On ignore si cette diminution était le fait des retailles successives qui étaient à charge du meunier (13).
Avec les années, le rendement des moulins à eau diminua ce qui avait des répercussions fâcheuses sur les revenus du propriétaire et de l'exploitant; ce dernier se trouvera souvent dans l'impossibilité de payer le fermage aux dates prévues dans le bail.
La cause de cette dégradation est en grande partie attribuable·au ruisseau dont le débit, avec le temps, devenait de plus en plus faible et de plus en plus irrégulier. Celà était dû au défrichement des terrains boisés qui bordaient la rivière. De tels sites retiennent l'eau et ne la libèrent que graduellement. Mais une fois ces mêmes lieux essartés, il n'y a plus de réservoir si l'on peut dire; il y a trop d'eau au moment de la fonte des neiges et aux pluies tonentielles mais cela n'est d'aucun profit. Il faut les laisser passer le plus rapidement possible pour ne pas provoquer d'inondations en amont. Rappelons que, à Jette, le Laerbeekbos pendant des siècles s'étendait jusqu'au Molenbeek et l'enjambait même partiellement. Mais plus tard, une large bande fut défrichée pour gagner des terres à la culture. On ne peut aussi oublier les étangs assez nomb reux dans la région. Entre le moulin à eau de Jette et le Valmolen, soit sur une distance d'un kilomètre à peine, on comptait encore, au début du 19e siècle, cinq étangs sur la seule rive sud du Molenbeek. Or, certains d'entre eux avaient été convertis en pièces d'eau d'agrément faisant partie de domaines de plaisance appartenant' à des familles aisées de Bruxelles ou étaient loués à des groenvisschers (marchands de.poissons d'eau douce). Afin de ravitailler ces étangs ou d'en renouveler l'eau, les moulins étaient régulièrement astreints au chômage. Ce n'étaient pas là les seu!es sèrvitudes qui frappaient lesmeuniers.
Voulant remédier à cet étàt de choses, l'abbaye de Dielighem avait converti des prés longeant le ruisseau entre l'actuel!e chaussée de Dielighem et de l'avenue du Sacré-Cœur en étang, immense nappe d'eau appelée le Vondelvijver et cela, pour disposer d'une importante réserve d'eau pouvant dépanner son moulin en cas de pénurie ou de sécheresse.
Les propriétaires du Valmolen cherchèrent, eux aussi,à améliorer le rendement de leur usine. En 1624, ils s'accordèrent avec les propriétaires du château voisin, dit de ter-Plast, et turent autorisés à déplacer une canalisation souterraine servant à l'évacuation de·s eaux jaillissant dans les carrières des abords du Stuyvenberg; cette opération permit, dès lors, de déverser les dites .eaux dans le Molenbeek en amont du Valmolen: l'autorisation leur était accordée ten eeuwigen dage ten dienste van den molen (14).
Mais la situation continua de se désagréger au point qu'en 1741, Jean Dominique de Villegas, comte de Saint-Pierre, propriétaire du Valmolen, voulut transformer l'usine en rosmolen c'est-à-dire dont la force motrice ne serait plus produite par l'eau mais bien par un arbre vertical placé au milieu d'un manège et que des chevaux feraien tourner à longueur de journée. Sa demande fut agréée par les Etats de Brabant par acte du 12 août de cette même année. Mais après établissement d'un devis et la supputation du bénéfice que cela pourrait rapporter, on s'aperçut que la première installation et son amortissement, l'achat de chevaux et leur entretien, etc. que tout cela finirait parcoûter plus que ce qu'on pouvait espérer ramasser, aussi le projet fut-il abandonné et l'acte de conclure hetwelcke allen meer soude monteeren ais de incomste (15).
Et le Valmolen continua de travailler à la petite semaine jusqu'au jour où il fallut abandonner tout espoir. Ses annexes furent démolies, après écroulement peut-être; on ne les voit plus su la photo prise en 1904. La roue et le barrage disparurent à leur tour; il ne demeura bientôt plus que le bâtiment principal et une petite chute d'eau d'à peine un demi-mètre de hauteur. La bâtisse n'en continua pas moins de s'appeler "moulin" - bien qu'elle eut été convertie en estaminet. Puis, un jour, on fit table rase et le ruisseau, voûté, se trouva ravalé au rang d'égoût !
* * *
Par qui le premier Valmolen avait-il été construit et à quelle époque? Aucun document n'en parle, aussi faut-il procéder par déductions.
Le prieuré de Grand-Bigard fut tout au long de l'Ancien Régime propriétaire de ter-Piast, le hameau de Laeken où était située l'usine, et cela pour l'avoir reçu des chevaliers de Bigard (16).
Dès lors se pose la question: est-ce cette communauté religieuse qui établit le moulin à moins que ce ne soient les de Leu (Sieeuws). importante famille bruxelloise à qui ce même site avait été donné en fief par le prieuré, hypothèse plausible car des liens intimes existaient entre eux et certains de Leeu furent prévôt de la communauté (17).
Une descendante, Marie Sleeuws, porta. vers 1310, une partie u fief laekenois en dot à son époux Jean van Buyseghem dit Buys (18). Or, ce dernier appartenait à une famille où de père en fils on était exploitant de moulins; ils détenaient habituellement plusieurs usines à la fois et, entre autres, à cette même époque,le Voortmolen qui tournait à Schaerbeek au lieu-dit Jérusael m (19).
De tout quoi il n'est pas interdit de penser que le Valmolen existait déjà. Plus tard, une descendante directe, Marie van Buyseghem dite Buys et son époux Jean van Heck aliénèrent leur part du Valmolen qui, vers 1504, passa alors dans le patrimoine de Gheert Kemmerjans (20). Un copropriétaire du moulin, Wencelin de Leeu (21). en fit autant à peu de temps de là et Kemmer jans se trouva posséder l'entièreté de l'usine ainsi que les terres voisines. Il n'était pas meunier de son état mais tenait sur la Grandplace de Bruxelles la taverne portant enseigne Au Sac. On sait qu'il mourut le 29 décembre 1525 et que son épouse le suivit dans la tombe le 13 juin 1550. Tous deux reposaient à Sainte-Gudula.
Ce fut lèur fille Pétronille Kemmerjans qui hérita de leurs biens. Quoique fille de cabaretier, mais dont la bourse devait être abondamment garnie, elle avait épousé maître Jean Reynen, avocat et procureur au Conseil de Brabant. Les époux allaient acquérir d'autres terres à Laeken aux abords du moulin. Pétronille mourut en 1570 et son mari trois ans plus tard (22).
Le ménage comptait plusieurs enfants qui, tous, occupèrent des situations fort enviables. Ainsi, leur 'fille aînée devint dame en Laeken c'est-à-dire pn priétaire d'une des sept seigneuries de ' l'heptàrchie de cette même commun son frère Godefroid Reynen, à qui écut une partie du Valmolen, entrep1 des démarches pour revaloriser cette usine. Il s'adressa à la Chambre des Tonlieux de Bruxelles pour que soit mis fin au trouble qu'il subissait dans l'exploitation de celle-ci. Grâce à ce document on sait qu'il y avait, à cette époque trois moulins à Laeken sur le Molenbeek. Le Keizersmolen, qui était la cause
Cette part du moulin fut loin d'être une source de jouissance pour le acquéreurs. Les tracasseries de la part des autres membres de la famir Reynen se multiplièrent. Tout y régnait sauf la concorde, d'autant plus qu certains d'entre eux avaient élargement hypothéqué leur quete-part (25). Il y et des saisies qui n'allèrent pas sans déranger la douairière della Faille qui n'avait rien à voir dans ces difficultés financières mais ·néanmoins en subissait le contre-coup! De guerre lasse, elle céda ses droits, en 1656, à Anne Reynen, fille de Godefroid Il Reynen et épouse de Charles de Kempenere (26).
Cette opération n'eut pas le don d'apaiser les esprits. Ajoutez à cela qu' y eut bientôt des mineurs d'âge parmi les copropriétaires et que leurs curateur se trouvèrent en butte à la malveillqnce des autres détenteurs de parts (27).
Enfin, en 1727, les détenteurs de parts qui étaient trois: Gaspard de Beautor les enfants mineurs de feu François van Heymbeke et François-Joseph de Pargaert décidèrent de commun accord de vendre le Valmolen (28). Cela se fait devant la Chambre d'Uccle; on désirait obtenir récolter 6.800 florins agent déchange. C'était vouloir beaucoup; il y eut dix-huit vacations et à l'issue de le dernièreon se contenta de ramasser 5.100 florins qu'on s'empressa de se partager.
L'acquéreur n'était autre que Jean-Dominique de Villegas - fondateur de la branche de Jette - et on épouse MarJe-Thérèse du Bois dite van del Bossche. Le Valmolen allait rester dans leur famille jusqu'au moment de la démolition en 1904. Seront successivement propriétaires du moulin après leu décès: Marie-Françoise de Villegas, douairière du baron Jacques de Surmonl dont la succession fut liquidée en 1815. Balthasar de Villegas (t 1835), Pierre dt Villegas (t 1855) et enfin Léon Balthasar de Villegas qui mourut en 1917 (30).
* * *
Que sait-on des meuniers qui exploitèrent le Valmolen ?
Voici ceux dont le nom est venu jusqu'à nous.
Georges STOCKMANS, signalé de 1655 à 1672. Il appartenait à une importante famille de meuniers de la région bruxelloise; il était aussi colocataire du moulin à vent de Ganshoren tandis que son frère avait pris le Cammemolen à bail (31).
Catherine VAN DE SANDE, veuve Peter BOGAERTS, citée dès 1672; elle vécut près d'un demi-siècle au Valmolen. Dans les dernières années, elle s'était assuré le concours de son beau-fils, Jean de CANTER (32). Celui-ci, après la mort de Catherine, continua de travailler au moulin jusqu'en 1729 ; il fut quel ques années l'associé de André PANNELS dont la famille figure aussi par les dynasties de meuniers bruxellois (33).
Judocus de BASER, meester molder van Brussel, s'installa au moulin après la conclusion d'un bail avec le comte Jean-Dominique de Villegas le 24 janvier 1729. Il était apparenté à Jean de CANTER précité. Ledit bail prit cours à la ml-mars et le loyer était de 250 florins argent de change l'an. L'objet du contrat est décrit comme étant "sekeren terwe ende corenmolen gestaen ende gelegen tot Laecken geheeten den Valmolen metlen huyse, stalle, Schueren, boomgaert gelijck oock de Weljdendaeraen gelegen (34).
Le preneur pouvait résilier le contrat de trois en trois ans et il lui était interdit de sous-louer l'usine sans accord préalable du propriétaire. Le loyer devait être payé en deux fois au cours de l'année. Le preneur s'engageait à entretenir convenablement l'usine et particulièrement les Cammen (les engrenages), splllen (la lanterne), tappen (les tourillons), banden (cerclages des roues et des meules), cabels, winden (courroies), zeelen (cordages), Schuddeberden (vannes), buyten ende blnnenraderen (roues extérieures et intérieures), ende generalyck alle andere roerende wercken soo buyten als binnen, ende naementlyck oock den meuleboom (arbre moteur) (35).
L'épinçage des meules, c'est-à-dire la retaille était à la charge du preneur. Au fin du bail, au moment de la prise de congé, on ferait appel aux bons offices d'experts pour refaire le tour du propriétaire et, entre autres, pour mesurer l'épaisseur des meules dont le degré d'usue était dédommageable au pro rata des pouces perdus en hauteur (36).
Parmi les autres obligations imposées au meunier, il y avait celle de curer le ruisseau depuis son usine jusqu'au ponceau en aval sous le chemin de Molenbeek-Saint-Jean-Meysse (37).
Sur le dessin de Puttaert, reproduit ici, on voit que le Molenbeek était bordé d'arbres; le meunier ne pouvait les couper mais seulement truncken de trunckboomen ende sleuren de opgaende ende wlntscheuten des arbres fruitiers (étêter les saules, émonder les lutais et couper les pousses folles). Il pouvait supprimer les arbres morts à la condition de les remplacer. Quant aux impôts grevant l'usine, ils étaient payés par le propriétaire et le locataire fifty-fifty (38).
Les comptes de gestion font apparaître que le meunier devait certaines corvées tels que transports pour le propriétaire; on sait ainsi que de Baser avait véhiculé du hoe (foin), houlle (charbon), et de la "torve asse" (cendre de tourbe employée comme engrais). Il devait livrer de la farine à de Villegas et par-ci par là on mentionne un sac de première qualité appelée belle-fleure (39).
Si, au début, les relations entre bailleur et preneur furent placées sous le signe de l'entente cordiale, celles-ci ne tardèrent pas à se gâter. Dès 1730, le meunier eut difficile de payer le fermage, situation qui devait aller empirant. En 1732 de Villegas fit effectuer une saisie-arrêt sur les biens meubles de Baser et sur un quart de la caution déposée en sa faveur. L'année d'après on fit une nouvelle saisie, aussi de Villegas fut-il heureux de voir partir son locataire en 1735.
L'usine fut alors louée à Peter GEETS et à son épouse Jean van den Borre, maitre-meuniers à Bruxelles (40).
Fut-ce à la suite des guerres de Louis XIV ou à la déchéance du moulin, le propriétaire rencontra les mêmes difficultés qu'avec de Baser (41). Les Geets abandonnèrent la partie en 1739 et furent remplacés, pendant neuf mois, par Judocus SEGHERS (42). Un document nous apprend qu'il produisait en moyenne 12 sacs de farine par jour dont trois revenaient de plein droit au propriétaire.
Cela faisait, lit-on, 360 sacs par mois et 3.280 pour le temps qu'il passa au Valmolen. Chacun de ces sacs ayant une contenance de 2 setiers donnait un total de 6.288 setiers pour les trois trimestres (43).
A son départ - à moins que ce ne fut à son décès - le moulin fut repris par Peter GEETS dont il a été question. Son fils se porta garant de la gestion de son père mais la situation ne fut guère plus brillante que la première fois.
Le 7 février 1742 Jan CEULEMANS lui succéda. Le contrat était similaire aux précédents à cette différence que maintenant de Villegas se réservait al het fruit of de vruchten die ieder jaer op de boomen soo happelaers, pelrelaers, notelaere ende krieckenlaere slaende sur le site du moulin.
Le bail fut renouvelé en 1753.
L'usine sera ensuite exploitée par des meuniers associés, François CEULEMANS (44), fils du précédent, et Jan VAN DER BORGHT (45); ils renouvelèrent leur bail en 1789. Le citoyen Ceulemans - nous sommes sous régime français - éprouvera des difficultés financières à paritr de 1798 et sera bientôt redevable de deux années de fermages.
Après lui, son fils, Jacques CEULEMANS (46), tentera mais en vain de redresser la situation; mais ses dettes atteignirent bientôt la somme rondelette de 4.355 florins !
Vraiment le métier de meunier sur le Molenbeek ne nourrissait plus son homme. Ceulemans finit par accepter, le cœur gros, qu'on vende publiquement ses deux chevaux, ses vaches,ses karren, ploegen, eggen, het molders en ackers gerief, zijn hoey, stroey, ainsi qu'une partie de son mobilier sans oublier le produit à venir de ce qu'il avait semé et planté (47).
C'était pour le Valmolen une fin bien lamentable...
Notes
(1) Arch. Générales du Royaume, Greffes scabinaux n° 4.158, t. 166 v° et 187.
(2) Collections iconographiques de l'I.R.P.A.
(3 A. COSYN, Laeken Ancien et Moderne, Bruxelles, 1904, p.7.
(4l Section C, parcelle 47.
(5 Archives de l'Etat à Namur, Fonds de Corroy-le-Château, n° 2.359.
(6) Idem.
(7) A.E.N., Corroy, n° 2358.
(8) R. VAN DEN HAUTE, Les Moulins de Schaerbeek, étude inédite.
(9) MARTINEZ: Het Recht Domaniael, Bruxelles,1692, et A.E.N., Corroy, n° 2.359.
(10) MARTINEZ, op. cit., p. 262.
(11) A.E.N., Corroy, n° 2359.
(12) Idem.
(13) Idem.
(14) A.G.R., Gr. scab., Bruxelles, no 4.525 f° 3. A.E.N., Corroy, n° 2.357. A.G.R., Chambre des Comptes de Brabant,n° 44.843, f° 175 v° et n° 44.845, f° 314 v°.
(15) A.E.N., Corroy, n° 2.359.
(16) L. GALESLOOT, L'Ancienne Heptarchie de Laeken Notre-Dame, Gand, 1878, p. 38.
(17) Pour cette famille voir: H.-C. van PARYS et F. de CACAMP: Généalogies des familles Inscrites aux Lignages de Bruxelles en 1376, Bruxelles, 1971, pp. 222 et ss.
(18) Pour les van Buyseghem dits Buys, voir idem, pages 277 et ss.
(19) Voir note 8.
(20) A.G.R., Chambre des Tonlieux, n° 82, 1n 115.
(21) A.G.R., Gr. scab., 4.517.
(22) Pour les Reynen, v. Bibl. Rie, Ms Il, 6.607, f° 207.
(23) A.G.R., Gr. scab., 4.516 f° 187 et 4.529.
(24) B.A., Mss II, 6.540, t. 60, 11.
(25) A.G.R., Gr. scab. 4516 et 4.525, f° 81 v°.
(26) A.G.R., Gr. scab. 7.241.
(27) A.E.N., Corroy, n° 2.357.
(29) Idem et A.G.R., Gr. scab., 7.241.
(29) A.G.R., Gr. scab., 4.524 et 4.525.
(30) A.E.N., Corroy, 2.359.
(31) A.G.R., Gr. scab., 9.502. A.G.R.,Office fiscal, 2.330.
(32) A.G.R., Etats de Brabant, 6.022, f° 30 et 6.023. A.G.R., Gr. scab., 4.525, t. 3. A.E.N., Corroy, 2:.57.
(33) A.G.R., Gr. scab., 4.525, f° 10. A.E.N., Corroy, 2.360.
(34) A.E.N., Corroy, 2.359, 2.360 et 2.361.
(35) A.E.N., Corroy, 2.360.
(36) Idem.
(37) Idem.
(38) Idem.
(39) A.E.N., Corroy, 2.359.
(40) A.E.N., Corroy, 2.359 et 2.360.
(41) Idem.
{42) Il appartenait, comme les autres meuniers cités, à des familles bruxelloises qui, depuis des siècles, exploitaient des moulins dans la région entourant la capitale et à l'intérieur de celle-ci.
(43) A.E.N., Corroy, 2.362.
(44) A.E.N., Corroy, 2.359.
(45) A.G.R., Etats de Brabant, 6.023 !0 '37, 6.024 1° 16, 6.026 fo 16, 6.027 !0 16, 6.028 fQ 8.
(46) A.E.N., Corroy 2.359.
(47) ldem
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Arthur Cosyn, "Les anciennes Seigneuries de Laeken", in: Annales de la Société Royale d'Archéologie de Bruxelles, tome 30 fasc. I, p. 39:
"En 1517 Gérard Kemmer Jans, tavernier du "Sac" à Bruxelles, fit l'acquisition du moulin de Ter-Plast, c'est-à-dire due Vallemolen. Il l'acheta à Wencelin de Leeu. En 1573, ce moulin appartenait à Godefroid Reynen, avocat au Conseil de Brabant, petit-fils de Gérard Kemmer Jans. D'après l'acte de 1517, le moulin et ses trois atangs étaient contigus aux biens ayant appartenu à Walter Magnus, puis à Guillaume T'Serclaes.
Le moulin fut cédé par Godefroid Reynen à Charles dellla Faille et Hélène Maes, son épouse. Un accord intervint entre eux en 1624. Jean-Dominique de Villegas de Kinschot en fit l'acquisition een 1727 (Sekeren watermolen met huysinge, boomgaert, weyden, twee vyvers, etc., ter plaetse geheeten de Valle, wesende eenen terwen ende coren molen, groot t'saemen drye bunderen... aen welcken molen den heere baron de Poederlé ten eeuwigen daege moet laeten volgen het waeter commende van de Poelbeke (schepengriffie N° 4525)).
Après avoir été longtemps transformé en petite ferme ou en guinguette, le Vallemolen fut rasé en 1904, lors de la création du boulevard Emile Bockstael et du voûtement du Molenbeek."
Robert Van den Haute, "A deux pas de Jette. Le Valmolen à Laeken", in: Ons Graafschap. Jaarboek van de Geschied- en Heemkundige Kring van het Graafschap Jette en Omgeving, X, 1973, p. 33-41.
Arthur Arthur, ""Laeken Ancien et Moderne", Bruxelles, Bulens, 1904, passim.
Arthur Cosyn, Les anciennes Seigneuries de Laeken", in: Annales de la Société Royale d'Archéologie de Bruxelles, tome 30, fasc. I, p. 39.
M.A. Duwaerts e.a., De molens in Brabant, Brussel, Dienst voor Geschiedkundige en Folkloristische Opzoekingen van de Provincie Brabant, 1961;
Herman Holemans, Kadastergegevens: 1835-1980. Brabantse wind- en watermolens. Deel 1: arrondissement Brussel-Hoofdstad, Kinrooi, Studiekring 'Ons Molenheem", 1989;
Paul Bauters & Marc Villeirs, Les moulins à eau et à vent de Woluwe-Saint-Lambert et de la région bruxelloise. Histoire et technologie / Water- en windmolens van Sint-Lambrechts-Woluwe en van het Brussels gewest. Geschiedenis en techniek, Woluwe-Saint-Lambert/Sint-Lambrechts-Woluwe, 1996 (Musée communal de Woluwe-Saint-Lambert, cahier n° 2 / Gemeentelijk museum van Sint-Lambrechts-Woluwe, tijdingen n° 2)
Mailbericht Wim van der Elst, voorzitter van Laca, 06.11.2013.
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