Gesves, Walloniƫ - Namen
- Naam
- Moulin de Hoyoul
- Gebouwd
- voor 1309
- Type
- Watermolen
- Functie
- Korenmolen
- Database nummer
- 8603
Karakteristiek
Beschrijving / geschiedenis
Les moulins et la forge de Gesves
Le moulin est généralement le premier établissement industriel du village, et toujours il est propriété seigneuriale (1).
S'il est vrai que la plus ancienne description que nous possédons du village de Gesves, savoir le polyptique de l'abbaye de Saint-Vanne (vers 1050) ne cite aucun moulin, cela ne veut pas dire qu'il n'y en avait pas. Nous pouvons seulement en conclure que le moulin n'était pas compris dans la donation que fit le comte Herman au monastère verdunois. Mais dans l'acte de 1091 qui constate la vente de la totalité de l'alleu de Gesves à Notre-Dame de Huy, il est expressément spécifié que les moulins y sont compris : "cum molendinis". Suivant ce texte, il y en avait dès lors plusieurs. Mais on peut se demander si ce pluriel ne résulte pas de l'emploi d'une formule usuelle, plutôt que d'une situation de fait.
Un moulin tournait certainement dès cette époque : c'est celui que nous retrouverons dans la suite sous le nom de moulin de Spinoit, érigé à l'endroit où le ruis seau de Gesves passe devant l'église et l'antique manoir, noyau primitif du village. Si, dès le XIe siècle, un second moulin existait, ce ne peut être que le moulin de Hoyoul, établi en aval pour desservir les terres cultivées sur le plateau qui porte le nom caractéristique de H mes.
Il faut arriver au XIVe siècle pour obtenir des précisions au sujet des moulins. Deux documents les fournissent :
c'est l'inventaire des revenus de Poilvache et de ses dépendances, dressé pour le comte Jean de Luxembourg en 1309 (2) ; et c'est la charte par laquelle ce même prince, en 1333, fit cession à Evrard de Bolland de l'ensemble des droits qu'il possédait sur le territoire de Gesves (3).
Le premier de ces documents compte à Gesves trois moulins qui sont nommés de l'Escaille, de Hoyoul et de Hourt. Le premier n'est autre que le moulin de Spinoit cité plus haut, qui reçoit ici une dénomination due à une caractéristique, soit de sa construction, soit de son emplacement. Dans la charte de 1333, il n'est plus question d'un moulin de l'Escaille, mais bien du moulin de Spinoit.
En 1309, ce moulin et celui de Hoyoul étaient soumis au même régime, savoir le partage par moitié des redevances entre le comte de Luxembourg, avoué de Gesves, et le seigneur de Spontin. Qu'est-ce à dire ?
Etant donné qu'il n'existe aucune trace d'une cession que les comtes de Luxembourg auraient consentie, dans le courant du XIIIe siècle, d'une partie quelconque de leurs droits sur Gesves, la seule explication du partage que nous constatons est qu'il remonte à l'acquisition de l'avouerie par Waleran de Limbourg, dont le comte Jean était l'ayant-droit. Le vendeur doit avoir retenu, en vendant l'avouerie, la moitié de ses droits sur les moulins; ce qui n'est pas sans exemple. Or, nous avons montré, au cours de cette étude, qu'un ensemble de faits concordants désigne les seigneurs de Spontin comme les
descendants du dernier avoué local de Gesves.
Pour le troisième moulin, dit de Hourt, le partage des redevances s'opérait différemment, et le seigneur de Spontin n'en avait que le quart (moins un vingtième remplacé par un porc). Qu'est-ce que ce troisième mou lin ? Son nom est celui d'une famille rattachée au lignage de Gesves, et dont la résidence fut établie — on l'a vu ci-dessus - dans la section de la vallée dite en vaux. Le moulin était voisin de cette demeure. Les terres qui en dépendaient s'étendaient entre Gesves et Hoyoul : portion de l'ancien domaine de l'avoué détachée au profit d'une branche de la famille. Comme ce démembrement est certainement postérieur à la vente de l'avouerie (1237), il n'est pas surprenant que le moulin construit à cette occasion ait été assujetti à des conditions différentes.
Lorsque Jean de Luxembourg roi de Bohême fit don à Evrard de Bolland de tous les droits qu'il avait à Gesves, il précisa soigneusement ce qui concernait les moulins. C'est ainsi qu'on entend parler alors pour la première fois du moulin de Wagnée, qui se trouvait dans les limites de la paroisse de Gesves et que le seigneur de Wagnée devra relever en fief et en hommage du seigneur de cette paroisse. Si l'on se rappelle que le chevalier Warnier du Cellier, grand propriétaire à Gesves, était en même temps, seigneur de Wagnée, pareille situation s'explique.
Jean de Bohême exclut de sa donation le moulin de Hoyoul. C'est que celui-ci, établi primitivement pour desservir un petit domaine agricole, avait acquis, grâce aux comtes de Luxembourg, un ressort qui s'étendait bien en dehors des limites de Gesves. Etaient obligés d'y faire moudre leur blé, les manants d'Assesse, Sorin-
ne-la-Longue, Corioule, Trignée, Millier, Jassogne, Ohey, Wallay, Haillot et Monceau, outre ceux du hameau de Hoyoul-sous-Gesves.
Quant au moulin de Spinoit, le comte transmit à Evrard de Bolland son pouvoir de contraindre, au besoin par confiscation et emprisonnement, les manants de Gesves, Spasse, Borsu et Francesse, d'y porter leurs
grains.
Il n'est pas fait mention dans cette charte du moulin de Hourt. En effet, ce moulin n'était point banal à
l'époque; il était établi pour les besoins d'un domaine particulier dont les possesseurs, en leur qualité de gens de lignage, n'étaient point astreints aux banalités. Le produit du moulin de Hourt est sans doute compris dans l'ensemble des revenus de la terre de Gesves, qui fait l'objet de la cession.
* *
Les choses n'en restèrent pas là. D'abord, en 1342, le château de Poilvache et ses dépendances furent cédés à la comtesse de Namur, Marie d'Artois. Les comtes de Namur exercèrent donc dans la suite les droits qu'a vaient auparavant les comtes de Luxembourg sur le moulin de Hoyoul. Ainsi lisons-nous dans le compte des domaines de Namur, pour 1356, que Hankinet le meunier, fermier du moulin de Hoyoul, devait dix muids pour la part du comte, le surplus du fermage étant dû au seigneur de Spontin. En 1377, Guillaume sire de Spontin et Guillaume son fils acquirent la part du comte, sous la réserve que les chevaux confisqués au préjudice des contrevenants appartiendraient à celui-ci (4).
Voilà donc le moulin de Hoyoul devenu la propriété exclusive du seigneur de Spontin. En 1432, ce seigneur
était Robert, veuf de Marie de Sombreffe; et ses biens appartenaient en nu-propriété aux enfants issus de son mariage, notamment à son fils aîné Guillaume. Entre celui-ci et Jean de Juppleu seigneur de Gesves, des pour parlers s'ouvrirent, qui aboutirent à l'arrangement suivant :
Robert de Spontin abandonna au profit de son fils l'usufruit du moulin de Hoyoul, étant entendu que, tant qu'il vivrait, les manants de Ohey, Haillot et Monceau devraient faire moudre, non plus à Hoyoul, mais au moulin de Gramptinne dit de Tirifays, autre propriété des Spontin. Guillaume, investi ainsi de la pleine
propriété du moulin de Hoyoul, le vendit au seigneur de Gesves pour une rente de trois muids de mouture, outre le cens de cinq francs dû au duc de Bourgogne,
comte de Namur (5).
Ce dernier acte se rattache à d'autres circonstances qu'il nous reste à raconter. On a vu ci-dessus que les
manants de Gesves étaient assujettis à la banalité du moulin de Spinoit, et qu'il existait un moulin dit de
Hourt, lequel n'avait pas de « chasse », mais desservait le domaine libre de ce nom.
A une époque que nous ne pouvons préciser, antérieurement à 1430, le seigneur de Gesves laissa le moulin de Spinoit tomber en ruines et reporta la banalité sur le moulin de Hourt. Pourquoi ? accident, vétusté, peut-être spéculation, car il ne touchait que la moitié des produits du moulin de Spi noit, tandis qu'il avait les trois quarts de celui de Hourt.
Telle était la situation en 1430, lorsque passa le flot dévastateur des troupes liégeoises. Tous les moulins
furent brûlés; et quand vint l'heure de réparer le désastre, l'on chercha la solution la plus pratique.
A Pâques 1432, le seigneur de Gesves tint une assemblée générale de ses manants, où il exposa les faits
accomplis : ruine du moulin de Spinoit, incendie récent par les Liégeois des moulins de Hoyoul et de Hourt.
Pour remédier à la situation, il leur dit son intention d'acquérir l'emplacement du moulin de Hoyoul, qui pourrait desservir Gesves en même temps que sa clientèle extérieure. Nous savons que l'affaire était conclue avec les Spontin. Puis il exposa le fonctionnement du système proposé. Les manants de Gesves seraient tenus de faire moudre au moulin de Hoyoul, comme autrefois au moulin de Hourt; il y aurait deux meules tournantes, celle d'aval pour le ban de Gesves et l'autre pour l'an cien ressort, c'est-à-dire pour la clientèle extérieure. Cela fut admis à l'unanimité et consigné dans un record de la haute cour de Gesves en date du 2 septembre 1432 (6).
Reconstruit et accru en importance, le moulin de Hoyoul fut loué à des fermiers jusqu'en 1470. A cette date, le locataire était Jean Dubois, échevin de la cour de Gesves et homme de lignage (7). Philippe de Jup-
pleu, qui gérait alors la seigneurie pour son père, jugea bon d'appliquer au moulin le procédé, alors en vogue, d'arrentement ou, comme on disait, d'accense héritable.
Il le céda donc à Dubois moyennant une rente annuelle de vingt-huit muids de mouture, dont cinq setiers par semaine devaient être livrés au château. D'autre part, le seigneur devait donner chaque année au meunier du drap pour une « cotte de livrée » (8). Dès lors, la propriété du moulin, sous la forme qu'on appelait lansage, passait à Dubois et à ses héritiers; si bien que l'un de ceux-ci, prenant du galon, en fera relief comme d'un fief devant la cour féodale de Poilvache (9).
Mais en 1490, voici que de nouveau le moulin est incendié. Le seigneur de Gesves, qui était encore Philippe de Juppleu, renonça pour un an à sa rente, le meunier Arnoul Dubois s'engageant à remettre le moulin en bon état. Ces nouvelles conventions furent actées par la cour de Gesves le 24 novembre 1491 (10).
L'histoire du moulin de Hoyoul ne finit point par cet accident; elle aura dans la période suivante des péripéties épiques.
* *
On sait que, sur les deux rives de la Meuse, se développa, dès l'époque romaine, une puissante industrie métallurgique. Cependant, il ne paraît point que, à Gesves, l'habitation romaine, dont on a constaté l'exis
tence au début de cette étude, ait eu pour raison d'être l'industrie du fer. Mais au moyen-âge, l'emploi de la roue hydraulique fit installer des forges dans les vallées; or un endroit réunissait toutes les conditions qu'il
fallait pour la production métallurgique, c'était celui qui a conservé jusqu'à nos jours le nom de Forges.
Le ruisseau de Gesves, appelé à cet endroit Hoyoul ou grand-ry, grossi de plusieurs affluents, y possède une puissance suffisante pour fournir la force motrice. Une vaste étendue de bois offrait le combustible en abon
dance ; enfin, le sous-sol renfermait du minerai de fer.
A quelle époque songea-t-on à mettre en valeur ces avantages ? Rien n'autorise à dire que ce fut avant la seconde moitié du XIVe siècle. C'est en 1345 que le comte Guillaume I de Namur accorda aux ferrons de
Marche-sur-Meuse, Jausse et Marlagne, des privilèges qui furent bientôt étendus à ceux de tout le comté (11).
En 1381, nous voyons quatre associés s'engager à livrer, pour l'usage du comte de Namur, certaine quantité de fer fabriqué aux forges de Gesves (12). Le chef de l'association, nous l'avons déjà rencontré dans plus d'un
chapitre de cette étude, c'est Jean dit Hanekin de Hourt, issu du lignage de Warnier du Cellier, homme allodial et échevin. Il résidait non loin des forges et possédait des terres dans la vallée du Hoyoul parmi lesquelles,
semble-t-il, l'emplacement où fut établie l'usine. De là vint probablement le nom de Hourville, forges de Hour-
ville qui fut donné à cet établissement (13). Ses trois associés étaient Stévenart le Fèvre, qui fut maire de
Gesves en 1392; Danilon le Bâtard, fils de Guillaume ou de Daniel de Gesves; et Lambrike fils d'un certain
Lambert sur lequel nous n'avons aucune indication.
Le 2 mars 1381, devant le bailli d'Entre-Meuse-et- Arche, ces quatre s'engagèrent envers Jacques Coignet, valet de la bouteillerie du comte, à fournir en cinq mois cent et six livres de fer des forges de Gesves, engagement cautionné par le seigneur du lieu, Guillaume de Bolland.
Le même jour, ils acquéraient de celui-ci, la superficie de 75 bonniers de bois à couper en dix ans (14).
Le précieux document qui révèle ces conventions est le seul qui fasse connaître les forges de Gesves à cette époque. Un peu plus tard, les comptes des domaines de Namur révèlent que les ferrons de Gesves étaient auto
risés à prélever du minerai en toute localité du comté (15).
Quant au personnel qu'occupait une telle forge, référons-nous à l'édit de Charles le Téméraire, qui limite le privilège des ferrons à 22 personnes par forge : quatre pour le fourneau, deux pour Paffinerie, deux pour le marteau, un charretier, sept mineurs, un roqueteur, le maître, sa femme et ses serviteurs (16).
Que devint l'association qui florissait en 1381 ? Son chef, Hanekin de Hourt, disparut avant 1418 et Stevart le Fèvre n'est pas cité après 1393. Mais en 1442 et 1445, nous trouvons parmi les échevins de la cour de Gesves, un personnage dont la présence ne peut être attribuée qu'à l'exploitation des forges : c'est Hendrick le ferron ou Hendrick de Hoyoul (17). Ce dernier nom suggère qu'il habitait dans le quartier où précisément se trouvait le fourneau. S'agit-il de maître Hendrick le ferron d'Hermeton, dont le nom se lit maintes fois dans les comptes des domaines de Bouvignes à la même époque?
C'était un industriel important, exploitant plusieurs usines. Mais nous ignorons les circonstances de son installation à Gesves, et le temps qu'il y passa (18). Nous ne savons pas davantage quelle fut l'activité des forges de Gesves à la fin du XV0 et au XVIe siècle (19).
Elle avait cessé depuis quelque temps lorsque, vers 1570, Evrard de Seraing seigneur de Gesves fit établir un moulin sur l'emplacement de l'ancienne forge; on l'appela le « Neumoulin as forges de Hourville ». Et, de nos jours encore, le nom de Forges demeure attaché aux lieux qu'animait, au XIVe siècle, le fourneau de Hanekin de Hourt (20).
Baron M. HOUTART
(1) Fustel DE CouLanges, L'alleu et le domaine rural, p. 443.
(2) Document XVIII.
(3) Document XXV.
(4) Document XXXI. En même temps, le seigneur de Spontin racheta au comte de Namur la moitié du moulin de Stier qui avait été réservé lors de la cession du ban de Spontin à Guillaume, le héros de Woeringen.
(5) Document XXXVI.
(6) Document XXXVII.
(7) A. G. Conseil privé espagnol 1337. Poilvache. Preuves pour Paulet de Votey : Jean Dubois siège comme homme de lignage le 15 avril 1480.
(8) A. C. G. Copies d'un acte du 2 décembre 1470.
(9) Lahaye, Le livre des fiefs de la prévôté de Poilvache, p. 484.
(10) A. C. G. Copie d'un record de la cour de Gesves, du 24 novembre 1491.
(11) A. S. A. N., t. XII, p. 192.
(12) Document XXXII
(13) A. C. G. Acte du 21 mai 1590 : « le noux-mollin as forges de Hourville ».
(14) Document XXXII B.
(15) A. E. Namur. Recettes du comté 1409-1410, f° 73 v°.
(16) Charte de juillet 1470. Ordonnances des Pays-Bas, 2me série, t. I, pp. 487.
(17) A. C. G. et Archives des Hospices de Huy, reg. 341, f° 72 v°.
(18) A G. Chambre des Comptes, n°s 10501, 10502, 10508, 10516. Domaines de Bouvignes. Est cité : « Maistre Hendrik d'Ermeton », 1438-1454; « Hendricq le ferron », 1470.
(19) Dans le compte de la seigneurie de Gesves de 1538-1539, on cite la forge parmi les habitations exemptées de la taille. A. C. G.
(20) En 1787, on entreprit d'extraire du fer des « crahaux » de l'ancienne forge (A. C. G.).
Literatuur
M. Houtart, "Le village de Gesves durant huit siècles 1000-1800. Prmiè!re partie: Le Moyen âge (avec 5 cartes et une planche de sceaux)", Annales de la Société archéologique de Namur, XLI, 1935, 2, p. 159-307 (237-245, Chapitre VIII. Les moulins et la forge).
Roger Delooz, “Les beautés du namurois. La région de Gesves”. Lonzée, l'Auteur, 1992, 116 p.