Molenzorg

Vorst, Brussels Hoofdstedelijk Gewest


Tekening G.H. Degroeve naar kaart van Everaert, 1790
Algemeen
Collectie
Verdwenen Belgische Molens
Naam

Quakenbeekmolen
Kakenbeekmolen

Ligging
Rue Saint-Denis
1190 Vorst

Sint-Denijsstraat
op de Geleytsbeek
800 m N v.d. kerk


toon op kaart
Type
Onderslag watermolen
Functie
Korenmolen, oliemolen
Gebouwd
voor 1219 / 1617
Verdwenen
1582, oorlog /1885, werd huis
Beschrijving / geschiedenis

De Quakenbeekmolen of Kakenbeekmolen was een graanwatermolen met groot houten onderslagrad op de Geleytsbeek aan de huidige Sint-Denijsstraat (rue Saint-Denis).
Hij werd in 1219 aan de abdij van Ter Kameren geschonken door Arnout d'Overlies en zijn broer Franc Bule, met de toestemming van de kasteelheer, tevens leenheer van het leengoed van Quakenbeek.

Aanvankelijk maalde de molen graan. Van de 14de eeuw tot 1714 werd er olie geslagen en van 1714 tot bij de verdwijning werd er opnieuw graan gemalen.

De molen brandde af in 1582 tijdens de godsdiensttroebelen en werd pas in 1617 heropgericht.

Eigenaars na 1830:
- voor 1834, eigenaar: Van Volxem Jan Baptist, rentenier te Brussel
- 29.06.1874, maatschappij: De Onroerende Goederenmaatschappij van Vorst (notaris Van Bevere)
- 1875, regularisatie: de benaming is "Société Van Volxem et consort formant la Société civile immobilière de Forest".

Het molengebouw werd in 1885 omgevormd in een woonhuis. De gebouwen bleven bestaan tot voor de eerste wereldoorlog en deden toen dienst als herberg met als uithangbord "Café du Lac".

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Les droits sur le fief de Quakenbeke donnèrent lieu à des contestations au début du XIIIe siècle. Il  appartenait à ce moment à Arnould d’Overlies et jusqu’au 19e siècle le bloc de terres et de prairies sis à l’est de la ferme et du moulin portaient la dénomination de Petit et Grand Overlies. Il s’agit de l’espace limité approximativement par l’avenue Van Volxem, la rue du Feu, les rues Saint-Denis et des Carburants actuelles. Assisté de son frère Franco Bule, Arnould d’Overlies fit donation en 1219 à l’abbaye de la Cambre, des terres et du moulin de Quakenbeke d’accord avec son suzerain Leon d’Aa, châtelain de Bruxelles, sous condition de payer à ce dernier un cens de 4 deniers à la Saint André, 30 novembre (AEC chartrier n° 5566). Auparavant, le Duc de Brabant Henri I avait cédé à la Cambre (acte de l’an 1214) des terres d’une contenance de 4 bonniers sises à Quakenbeke (AEC n° 5566). De son côté le châtelain Walter d’Aa donna en 1221 à cette abbaye 5 bonniers et demi de terres à Quakenbeke ainsi que le 1/6 du moulin de ce nom. Les droits sur les 5 autres sixièmes avaient été acquis de Razo de Quakenbeke et furent cédés à l’abbaye de la Cambre par Henri, fils de Luzaire de Buesdal, qui les tenait en fief de Walter d’Aa. Ceci solutionna les litiges antérieurs car tous ceux qui auparavant avaient fait valoir des prétentions sur ce bien y renoncèrent en faveur de l’Abbaye de la Cambre en présence de Henri d’Aa, maire de Walter.

Le moulin de Quakenbeke existait donc déjà avant 1219. A l’époque c’étaient les ducs de Brabant qui accordaient l’autorisation de construire. Un moulin en ce temps lointain était un rouage non négligeable dans l’économie locale, puisqu’il rendait le hameau plus ou moins tributaire de son existence. Comme sans doute beaucoup de ses congénères celui de Quakenbeke connut des tribulations inhérentes à sa situation topographique.

La Geleysbeek qui prend sa source à Uccle au Vivier d’Oie (Diesdelle) et dont les eaux actionnaient notre moulin forestois avait anciennement un débit volumineux attesté par toute une série de moulins disséminés le long de ses rives. Cependant le déboisement progressif de notre commune et des parties de la lisière occidentale de la forêt de Soignes influença déjà la régularité du débit du cours d’eau dès le 14e siècle au point que pendant les périodes sèches de l’année les meuniers se virent obligés de conclure entre eux des accords amiables. C’est dans ces circonstances que l’Abbaye de la Cambre renonça, le jour des Saints Simon et Jude, en 1322 à ses droits sur le moulin de Quakenbeke « Afin de faciliter la marche des moulins du Nieuwmolen » sur la Senne, dont l’activité justifiait à ce moment la mise en action de plusieurs roues. A. Wauters, à qui nous empruntons ce détail, écrit que le moulin de Quakenbeke était situé plus en amont également sur la Senne. Ceci est inexact mais il s’agit d’une simple inadvertance de l’éminent historien puisque sur la carte publiée en tête du tome I de l’Histoire de Bruxelles il a fort bien situé le moulin sur la Geleysbeek. On peut déplorer toutefois que l’inexactitude fut reproduite ultérieurement par plusieurs auteurs.

En compensation de l’abandon des droits de l’Abbaye de la Cambre sur le moulin, le duc de Brabant Jean III accorda à ce couvent l’exemption de toute corvée pour sa ferme de Quakenbeke contigue au moulin. Pour des facilités d’exploitation divers échanges de terres et de fermes eurent lieu entre les Abbayes de la Cambre et de Forest dont certains biens s’interpénétraient (AEC n° 5696). C’est certainement au cours de ces échanges, qui se firent au XIVe siècle, et qui avaient pour objet de rapprocher les abbayes propriétaires des fermes exploitées à ce moment par des serfs en compte partagé, que Quakenbeke devint propriété du Monastère de Forest.

Le moulin traversa-t-il triomphalement les siècles ou connut-il l’existence cahotée de la plupart des entreprises humaines? Quels éléments favorables ou défavorables influencèrent cette activité ? Comment les divers occupants exploitèrent-ils notre première usine forestoise ? Essayons de répondre à ces diverses questions.

Après l’arrêt de son activité en 1322 on retrouve le moulin dix lustres plus tard comme moulin à huile. L. Verniers nous dit à ce propos assez laconiquement qu’ »un acte d’acquisition de mars 1372 cite l » « slachmolen ». Ce terme signifie: moulin à battoir ou à frappe. L’opération de l’extraction de l’huile s’appelait en flamand: olieslagery. La graine était broyée entre les meules du moulin et réduite en bouillie. Le battoir servait à triturer la pâte oléagineuse. Un moulin à huile était parfois actionné par des chevaux, d’où aussi le nom de « Rosmeulen » qu’on lui donna dans ce cas. Les moulins à huile payaient au moyen âge un fermage en nature comprenant toujours une certaine quantité de « raepkoeken, raepbroden, ou robbrooden » (orthographe des anciennes archives), les tourteaux de navette ou de colza constituant le sous-produit sortant des presses après l’extraction de l’huile. Ils étaient utilisés comme nourriture pour le bétail et surtout pour les vaches laitières dont on obtenait ainsi un lait très riche en matières grasses. On les destinait aussi parfois au fumage des terres.

Le nombre de tourteaux à fournir par le meunier de Quakenbeke était variable. En 1483 400 pièces ; en 1507 100 ; en 1555 200. Plus tard, cette obligation fut supprimée car les tourteaux de colza ou de lin devinrent une marchandise que chaque fermier put obtenir à volonté grâce à l’essor que prit la culture du lin et du colza et la multiplication des moulins à huile qui s’ensuivit. La frappe du tourteau de colza fut réglementée au point de vue du poids par une ordonnance de 1569 du Magistrat de Bruxelles exigeant « de ceux qui s’occupent à l’intérieur de la ville de battre de la graine de navette, de colza ou de lin et de faire de cette graine des tourteaux, que ces tourteaux devaient peser ce qu’ils pesèrent toujours anciennement (10 à 5 kg.). Le Magistrat crut devoir ajouter cette vérité de La Palice « afin que les acheteurs de la ville et ceux de la campagne ne soient pas lésés ». Evidemment.

Quoique la destination de moulin de Quakenbeke ait été à l’origine la mouture du grain il fut affecté très tôt au traitement des graine oléagineuses, activité qu’il conserva pendant près de 4 siècles. Cette activité est lié au développement de Bruxelles comme chef-lieu du Brabant, dont la bourgeoisie demande avec plus de confort plus de lumière (lampes à huile) plus d’huile végétale pour la cuisine et pour la fabrication de savon répondant à des besoins plus grands d’hygiène corporelle.  Le moulin de Quakenbeke ne revint à sa destination première de mouture des blés qu’à partir de 1714 jusqu’à sa suppression à la fin du XIXe siècle. Toutefois il n’est pas impossible qu’il ait fait les deux opérations ainsi qu’il est mentionné plus loin.

Sans donner d’autres précisions, L. Verniers écrit que le moulin de l’Oude Vorstweg fut moulin banal, c’est-à-dire celui auquel les villageois d’une certaine circonscription, en l’occurrence celle indiquée par le Monastère, étaient tenus, sous peine d’amende, de faire moudre leurs céréales, moyennant une redevance, souvent usuraire, appelée banalité. L’âme de cette activité était le meunier : de molder ou slachmolder, comme on l’appelait jadis, aidé de ses proches. C’étaient des travailleurs généralement d’un commerce facile de par la nature même de leurs occupations et dont l’humeur finissait par devenir aussi égale que le ronronnement saccadé et rythmique des meules de leur moulin. La nature nonchalante de ces travailleurs est d’ailleurs proverbiale. Le vieil adage forestois : faire ses pâques avec les meuniers signifie : arriver bon dernier.

Le plus ancien meunier connu de Quakenbeke est Moen (Edmond) Baers. Un registre de l’Abbaye intitulé « cheyns van den jaere 1416 » (AEF n° 7324) mentionne qu’en 1421 il souscrivit un bail de 6 ans, document très laconique : houdt de slachmolen te Quakebeke te pachte (voor) eenen termijn van ses (jaeren) gelyc de vorwerde int pachtboec van der eerne verclaren, ende gheeft elx jaers den god ( ?) XV corne vranxe etc.. A son entrée dans un moulin reconstruit ca run texte de 1411 (AEF n° 7324) nous apprend qu’à ce moment un certain Willem Merchans loua un bien rural à l’endroit où se trouvait précédemment le moulin à huile (eenre hofstadt dair de slachmolen placht te stane), une destruction venant s’ajouter à combien d’autres ?

Au meunier Baers succéda en 1427 Louis Belleken (AEF n° 7100 p. 78). Notre pays venait de connaître l’autorité de Philippe le Bon. On sait que le prince Philippe, très ambitieux, réussit par diverses manœuvres à s’emparer du Brabant compris dans les biens de sa nièce Jacoba de Bavière, veuve de Jean IV (1430). Nos régions en particulier connurent de ce fait une période de tranquillité relative que nos villageois purent mettre à profit. L. Belleken souscrivit le 10-7-1427 un bail de 12 ans, document qui nous indique de quel genre d’habitation il disposait. Les bâtiments dont il devait assurer l’entretien étaient couverts de chaume mais l’Abbaye lui fournissait la paille, les lattes et les ferrailles nécessaires. Il avait aussi la charge d’entretien des diverses mécaniques du moulin (cammen, spillen, dwingewercken), obligation qui fut reproduite dans tous les baux ultérieurs. Notons dans les objets qu’il recevait en prêt la dimension de deux grands seaux à huile d’une contenance chacun d’une ½ aune (65 litres). Le meunier Belleken eut à compter avec l’adversité. Dès les premières années du bail le moulin subit une nouvelle destruction. En 1434 on mentionne en effet un bien rural « sis à l’endroit à côté duquel se trouvait jadis le vieux moulin à huile sur la digue de l’étang entre la vieille maison meunière et les biens des enfants de Weyn Rullemans » (traduction doss. 7100 p. 4 AEF). Le moulin fut reconstruit en 1436 et Belleken vint le réoccuper à raison de 19 peeters d’or par an.

Gheert Devrieze lui succéda le 27-10-1441 (AEF n° 7100). Jean de Becker fut le meunier suivant en 1455. En plus des conditions habituelles il devait exécuter une corvée de chariot avec chevaux (AEF n° 7105 p . 115). De Becker était épicier-charcutier (vettewarier). Il manipulait le beurre, les graisses, etc., mais il ne supportait pas les matières grasses. C’est pourquoi il préféra venir se plonger dans les huiles et les tourteaux. En langage courant cela s’appelle tomber de Charybde en Scylla. Il est vraisemblable que le prénommé ait pris à son compte un sous-traitant car lorsqu’il renouvela son bail en 1461 « 15 daghe in Aprille », l’acte mentionne toujours la profession de « vettewarier ». Il fut exempt de la corvée de chariot mais dut payer 3 peeters d’or en plus. De la part de l’Abbaye ce n’était pas mal calculé du tout.

Dans les conditions faites au meunier Claes Vandenhovele, succédant à De Becker en 1473, on remarque le souci de la Dame Abbesse relativement aux inondations. Celles-ci durent souvent de révéler néfastes pour nos villageois car la Révérende Dame se réserva le droit d’immobiliser le moulin lors des grandes eaux en tirant le panneau de fond de l’écluse meunière « sal mogen trecken tgrondlaet van den waestgat » et d’évacuer ainsi les têtes de crues. Dans la période critique pour les terres ensemencées, c’est-à-dire entre Pâques et le Pentecôte, elle pouvait laisser le panneau ouvert pendant 2 jours et 2 nuits moyennant indemnisation du meunier pour l’immobilisation de ses roues (AEF n° 7105 p. 116). Plus tard on estimera que pour pouvoir être indemnisé le chômage du moulin devra atteindre au moins 8 jours, simple détail, mais qui montre que la conjoncture est favorable et que le meunier gagne sa vie. Du fait, lorsqu’à la mort inopinée de Philippe le Beau, survenue en 1506, Charles-Quint, son fils âgé alors de 6 ans, devint notre monarque un temps nouveau est inauguré. Notre pays bénéficie d’un marché agrandi par les immenses territoires espagnols y compris l’Amérique et les Indes, qui venaient d’être découvertes.

Le moulin est loué à ce moment (1507) pour 12 ans au meunier Adrien Vanderschueren, maître de la Table des Pauvres en 1524 et échevin de Forest depuis 1526 (greffes Scab. 3326). Sa fille Jacquemine épousa Henri Langevelt, fils de Gilles, qui succéda à son beau-père en 1555, année au cours de laquelle, fatigué du pouvoir, Charles-Quint abdiqua en faveur de son fils Philippe II. Henri Langevelt devint échevin de Forest, et le 1-11-1561 il fit comme « Huisarmenmeester » devant le maire du village le serment de gérer avec dévouement les biens de la Table des Pauvres comme il gérerait ses biens propres. Le meunier Langevelt et son épouse vécurent une période profondément remuée par les troubles sociaux et religieux et par les exactions de la soldatesque espagnole. Ces « furies » atteignirent leur paroxysme en 1578. « Il na passait pas de jour que les Espagnols ne fissent des « incursions » dans les villages des environs de la capitale et n’y fissent prisonniers des paysans qu’ils pouvaient n’épargnant même pas les petits enfants, les fils ou les filles » (HF p. 124). Les bandes de calvinistes ne se montrèrent pas moins cruels. Ils incendièrent l’Abbaye de Forest et presque tout le village en 1582. Le moulin de Quakenbeke fut détruit de fond en comble après que le malheureux Henrike Langevelt eut obtenu de la Révérende Abbesse, Françoise de la Douve, « en raison de son grand âge » une prolongation de son bail pour le restant de sa vie (AEF 7131). Le moulin ne se releva de ses ruines qu’en 1617 après qu’il fut resté à l’abandon pendant de longues années (« welcken molen nu onlanx ierst is wederomme vuyten fondamente opgemaeckt, naer dat hij menichte van jaeren hadde onder de voeten gelegen » (AEF n° 7208). La plupart des terres cultivées étaient devenues  des « wildernissen » ou bien envahis par des hordes sauvages. On aura par l’exemple suivant une idée de l’état d’abandon dans lequel était tombé à ce moment le village de Forest.

Dans la petite « Meulekasseike » face au moulin les arbustes avaient poussé au milieu du chemin, rendant tout passage avec chevaux et charrettes impossible. Il fallut une action collective des échevins et du maire Devleeschouwere pour remettre le chemin en état. Ce n’était d’ailleurs plus un chemin mais un petit bois, à tel point qu’on décida de ne porter la hache que sur les arbres du milieu, entravant le passage des véhicules « heeft doen affhouwen oft aft cappen nyet alle de boomen die opde straete stonden ende waeren belettende die passage van wagens ende kerren » (AEF n° 7208).

Ce fut Pierre Stockmans qui reprit la meunerie après restauration en 1617 mais il ne l’occupa que pendant  4 ans. Son successeur Hans Verlinden fut lui-même remplacé 6 ans après par Henri Verborght ou Vanderborght. Celui-ci quitta le « corenmolen » déjà après 3 ans pour le remettre à Martin Messains ou Messians. Nous ignorons la cause réelle de ces départs prématurés. Mais nous notons que l’exploitation est déficitaire et que la plupart des meuniers restent à leur départ redevable d’un arriéré de loyer important.  La meunerie se débattait dans d’indéniables difficultés. L’Abbaye stimulée par les pouvoirs publics se montrait pourtant compréhensive et accordait des modérations.

Les successeurs Gillis Speltens en Jean Van Boxsens louèrent l’établissement « in solidum » ou solidairement en 1638. Jean Van Boxsens, qui entretemps s’était marié, continua la meunerie pour son compte en 1649 et lorsqu’il décéda en 1654 sa veuve, née Schoeps Claesyne (Nicole) poursuivit l’exploitation après s’être remariée la même année avec l’infortuné Martin Cool, qui mourut déjà l’année suivante. Nicole Schoeps ne jeta pas la manche après la cognée. Le 26-7-1657 elle prit un nouvel époux en la personne de Pierre Servaes, qui avait à ce moment 29 ans. Ce Pierre Servaes est parmi les meuniers de Quakenbeke une des personnalités les plus attachantes. Il connut les jours les plus sombres de l’histoire du village mais ne se laissa jamais abattre par le destin. Aidé de se courageuse épouse, et plus tard de son fils François, il tint le gouvernail contre vents et marées, au cours d’un terme mémorable de 53 années d’exploitation.  C’est sous sa gestion que l’on vit s’amonceler dans le ciel politique des nuages menaçants. Les invasions françaises de 1667 furent le signal de calamités de toutes sortes qui s’abattirent sur nos malheureuses régions et dont nos populations rurales payèrent un lourd tribut. En l’espace de 14 ans, de 1683 à 1697, le village de Forest fut envahi six fois, soit par les militaires amis ou ennemis, soit par les populations fuyant devant les armées. Ces fuyards fourragèrent ou plutôt ravagèrent totalement les cultures, les vergers, les bois. Nous n’avons pas de données précises au sujet des déprédations qui se commirent à Quakenbeke mais on ‘imagine aisément ce qui fut en ces temps pénibles, la vie dans notre entreprise forestoise. Car pour les habitants des campagnes l’état de guerre signifiait toujours la même chose : logements, réquisitions, violences, pillages, pertes de récolte et autres dommages anéantissant en peu de jours le fruit de toute une année de travail. Ce n’est pas sans raison que la période de l’occupation de notre pays par les armées de Louis XIV fut appelée le siècle de malheur. Les temps étaient devenus si incertains que les villageois devaient eux-mêmes assurer la sécurité de leurs personnes et de leurs biens. Ils devaient s’attendre à tout moment à la visite de bandes armées, de brigands, qui, profitant de l’obscurité, venaient par la torture extorquer les deniers si péniblement amassés. Notre ferme-moulin devait d’autant plus apprécier les avantages de la paix que dans les moments de calme elle était en quelque sorte privilégiée, se suffisant à elle-même pour tout ce qui concernait l’alimentation. Elle consommait sa propre production de pain, beurre, œufs, viande, laitage, fruits et légumes et de grand matin les meules chantaient à un rythme joyeux la chanson du mouvement et de la joie de vivre. Grâce à une planche de Jacob Neefs, publiée par Sanderus dans « Choreographia Sacra Brabantiae » édition 1659, il nous est conservé un croquis du moulin.

Le meunier Pierre Servaes siégea jusqu’en 1682 au banc échevinal de Forest. Il était aussi doyen et syndic ou maître d’amendes (boetmeester) des nations de la ville de Bruxelles : chaque corporation y élisait un syndic, qui était son porte-parole auprès du Magistrat ou du Chancelier du Brabant. En 1701 et 1702 Servaes était le fermier percepteur des dîmes. Il était propriétaire de divers biens fonciers, dont l’auberge « Den Coninck van Spagniën » en face de l’église et lorsqu’il mourut à l’âge de 81 ans il reçut les honneurs qu’il avait largement mérités par une vie d’honnêteté et de travail. On l’inhuma au sanctuaire de Notre-Dame dans l’église de St-Denis, sa paroisse. Une dalle funéraire sous la tour, le rappelle à notre souvenir : « Hier leydt begraeven Petrus Servaes in zijn leven gewesene deken ende boetmeester van de natiën der stadt Brussel, oudt 81 jaeren, sterft den 26-7-1709 ». Il est à noter que c’est par erreur que cette pierre tombale indique la date du 26 juillet. D’après les registres communaux, P. Servaes décéda le 24-7-1709, le 26 juillet étant la date de sa sépulture : Obiit Petrus Servaes molitor qui 26 eiusdem sepultus est in templo forestensis in Sacello Dive Virginis.

François Servaes succéda à son père en 1709 mais remet déjà la meunerie après 5 ans. Il faisait partie du Magistrat de Bruxelles où il appartenait à la nation de St-Jacques. La corporation des meuniers avait pour armoiries l’emblème ci-contre. François Servaes était né à Forest le 28-4-1660, parrain Francis Eydens, marraine Anna Vanderborcht. Il avait hérité de ses parents les qualités d’honnêteté, de travail et de ténacité. Sa popularité et ses qualités d’administrateur le portèrent plus haut dans la hiérarchie sociale. Par une chaude journée de juin 1713 tard dans la soirée, à la « St-Jansdag » (24 juin) on vit arriver dans l’ »Oude Vorstweg » venant de Bruxelles, plusieurs calèches qui s’arrêtèrent devant l’entrée cochère avec arcade en anse de panier du vieux moulin de Quakenbeke. Il y avait de la joie dans ce groupe et lorsque les voitures eurent pénétré dans la cour de l’immeuble, François Servaes en descendit pour recevoir les effusions de ses proches. Il venait d’être promu «bourgmestre des nations de la ville de Bruxelles, charge très méritoire, pour un enfant de Forest. Il était à ce moment dans sa 53e année et fut bourgmestre pendant 4 ans. Il ne céda son poste que pour accepter celui plus assujettissant encore de receveur (rentmeester) de la ville de Bruxelles, fonction qu’il exerça pendant 11 ans jusqu’à sa mort survenue à l’âge de 68 ans, le 31-10-1728.

François Servaes avait épousé Catherine Van den Daelen. Il eut 5 enfants : Guillaume 1693 ; Catherine 1697 ; Marie-Albertine 1699 ; Jean-François 1700 ; Pierre 1703. Le fils Jean-François fut curé-chapelain de l’église St-Géry à Bruxelles (arch. Ville de Bruxelles n° 3407).

Théodore Aerts reprit du « burgemeester Servaes » l’exploitation du moulin à partir de Noël 1714, à la suite d’une taxation par experts des appareils divers en fer et en bois (AFF 7582). A en juger mar leurs procès-verbaux des 22 et 26 juin 1714, l’entreprise était assez importante.  Le moulin qui sous Servaes père était mentionné comme moulin à huile fait maintenant la mouture des grains. Il comporte deux roues intérieures traitant l’une le seigle, l’autre le froment, ce qui laisse entrevoir la possibilité d’une double affectation antérieure : les grains et l’huile. Les taxateurs nous apprennent que pour le « corenmolen » la meule tournante (den looper) avait une épaisseur de 10 ¼ pouces et la meule fixe (den ligger) 3 ¼ pouces. Pour le « terwemolen » ces mesures étaient respectivement 8 ¾ et 2 ¾ pouces (1 pouce = 28 à 30 cm.). C’était un vieil usage en meunerie de faire à l’entrée du bail une taxation des meules et accessoires mobiles « de ruerende wercken ». A la fin du bail on faisait une même taxation et le meunier  sortant payait une indemnité par pouce d’usure, ou recevait une indemnité par pouce d’excédent, si au cours du bail les meules avaient été renouvelées. A Quakenbeke celle-ci était fixée à 12 fl. du Rhin par pouce, dès 1637 (AEF dossier 7133).

Au cours des dix années de gestion du meunier Th. Aerts l’exploitation se révéla désastreuse. Il quitta Quakenbeke à la St. Jean 1724 et resta débiteur de 900 florins, soit un arriéré de loyer de 2 ans 3 mois. Après qu’on eut saisi tout son avoir : les chevaux, le matériel, les marchandises, sa part dans les récoltes, ainsi que 100 fl prix de réalisation d’une petite ferme, il resta redevable de 710 – 8 fl, somme qui fut considérée comme irrécouvrable. C’était la ruine complète (AEF reg. 7468 à 7473).

François et Henri Herinckx reprirent solidairement l’exploitation en 1724. Ils furent les meuniers pendant 46 ans. Henri du moins, car François se retira en 1745 pour exploiter le moulin à papier « op de beek ». Henri Herinckx était échevin depuis 1756. C’était un bourgeois cossu (iene die er werm inzit, comme on dit en patois local !) Il se retira des affaires à la Noël 1770 pour remettre Quakenbeke à François Verheylewegen, meunier, venant de la baronnie de Carloo (Uccle-St. Job). Les Verheylewegen furent les derniers exploitants de l’ancien régime : François pendant 25 ans, son fils Henri depuis le 12-9-1795. A la veille de la dispersion des biens de l’Abbaye de Forest ma meunerie comprenait des terres et des prés d’une contenance totale de 8 b 2 j 33 verg. Comme c’était souvent le cas, Henri Verheylewegen était donc autant fermier que meunier. C’est sous sa gestion que survinrent les événements qui amenèrent l’expropriation des biens ecclésiastiques et la vente du moulin. Soit dit en passant, ces ventes se firent sans grands égards pour les droits des fermiers ou locataires, ni des pertes qu’elles allaient occasionner à l’économie locale. C’est ainsi que les étangs furent vidés et le poisson offert en vente publique le 9 ventôse an V ( 27-2-1797). Le commissaire vendeur Fébus assisté du délégué municipal Van Haelen Mathias, se présentèrent à Forest à 10 h du matin et avaient déjà vendu 15 lots pour le compte de l’Autorité Républicaine lorsque le meunier Henri Verheylewegen vint exciper de ses droits de possession et fit arrêter la vente (AEF dossier 7571). Les Verheylewegen étaient une vieille famille de fermiers de l’Abbaye de Forest. Ils étaient depuis la fin du 16e siècle les tenanciers de la ferme d’Elishout à Anderlecht.

Ci-contre une vue de Quakenbeke d’après la carte du géomètre Everaert en 1790. Le moulin qui, depuis près de sic siècles avait été propriété ecclésiastique, fut déclaré bien national par décret du 14 fructidor an IV (1-9-1796) de la République Française. Ce décret supprima les établissements religieux en Belgique et ordonna la confiscation de leurs biens au profit du Trésor. Quakenbeke fut vendu aux enchères le 13 ventôse an V (4 mars 1797) et adjugé au sieur Samson pour la somme de 84.000 livres. Suivant le lotissement français, il contenait avec la ferme, ses dépendances ainsi que les grans et petit étang cités plus haut 17 bonniers, 1 journal, 43 verges, consistant principalement en prairies basses (beempden). Nous le retrouvons au début du siècle suivant en possession du sieur Van Volxem (Bibliothèque royal, cartes et plans IV 274)

De la période succédant immédiatement aux évènements ci-dessus, consacrons une mention spéciale au meunier Leten Jean François, fils de Stéphane. Il avait épousé le 8 janvier 1809 Catherine Vligen, veuve du meunier précédent Henri Verheylewegen, décédé le 22 Brumaire an VII (13-11-1798). Leten était un homme ponctuel et actif ayant un très haut souci de ses devoirs de citoyen. Il fit partie du premier Conseil Communal institué sous le régime hollandais et entra en fonctions le 17-6-1818 sous le mayorat du comte Martin Cornet de Ways-Ruart. Le Conseil Communal le proposa ensuite à la charge d’échevin de l’Etat Civil, dont il prit possession le 20-6-1819 et dont il s’acquitta avec un courage et une abnégation absolus. Il s’occupa de l’état-civil, de l’église paroissiale, de la surveillance des travaux, de l’entretien des voies de communication, des coupes de bois, etc. Les documents le montrent partout présent.  Lorsque le 14 novembre 1829 le mayeur Comte Cornet de  Ways-Ruart cessa de présider les séances du Conseil Communal, ce fut le premier échevin Jean Leten qui reprit cette charge jusqu’au 1-5-1830 (dernière réunion du Conseil avant la Révolution belge).

Divers indices montrent qu’avec le temps le moulin eut à compter avec des difficultés nouvelles. La Geleysbeek traversait le centre du village du sud au nord et dès le XVIIIe siècle ont commencé à s’installer le long de ses rives de modestes entreprises, puis des établissements de plus en plus importants, qui ont fait de Forest le grand centre industriel qu’il est aujourd’hui. Situé à la sortie du village, le moulin se trouvait forcément désavantagé, l’utilisation de l’eau de la Geleysbeek engendra des litiges qui maintes fois se tranchèrent à l’intervention du pouvoir judiciaire.

Les moulins à eau et à vent eurent au surplus, à partir du XIXe siècle, à soutenir une concurrence mortelle de la part des moulins à vapeur, en sorte que la décadence de Quakenbeke s’avéra finalement inévitable. Au recensement de 1855 il n’est plus que le seul moulin forestois. Il est encore cité en 1884 mais aux statistiques de 1895 il a cessé d’exister. A cette époque les deux meules restaient remisées, telles des reliques, dans l’ancien local de mouture. La roue motrice extérieure avait disparu, mais il restait en bordure de la rue St-Denis comme seul vestige de l’activité d’autrefois le garde-fou avec ses pilastres et assises en pierre de taille. La chaussée formait en aval du moulin vers Bruxelles un raidillon connu dans le langage populaire sous l’appellation de « het kasseike van de meule ». Au bas de cette montée un petit pont faisait dériver les eaux de la Geleysbeek à droite de la chaussée.

Le déclin laisse toujours une impression pénible, mais il s’en faut que nous ayons à terminer sur une note aussi pessimiste. Quakenbeke avait un prestige à défendre et il parvint, vers le dernier quart du siècle écoulé à redorer quelque peu son blason et à conquérir même comme station d’hiver une certaine renommée dans l’agglomération bruxelloise. Quelques vieux Forestois se rappellent encore les jours de patinage sur le « Lac de Forest » obtenu grâce à l’inondation de l’ancien grand étang dont il a été question.

Henri HERDIES

Le Quakenbeekmolen (qui devint plus tard la "laiterie du lac") fut situé le long du Geleysbeek.
Une ferme se dressait au niveau de l'usine d'encres d'imprimerie Dambremé (rue Saint Denis 136): la ferme du Boer van Sichem. En hiver elle devenait guinguette. Elle portait l'enseigne 'Laiterie du Lac' (Les amateurs de patinage de Forest et environs s'y donnaient rendez-vous.
Quand il ne gelait pas, les prairies inondées présentaient l'aspect de vastes étangs.

Bijlagen

Henri Herdies, "Pages forestoises d'histoire et de folklore, 1958, p. 48-62.
Forest Quakenbekemolen / Vorst Quakenbekemolen

Les droits sur le fief de Quakenbeke donnèrent lieu à des contestations au début du XIIIe siècle. Il  appartenait à ce moment à Arnould d’Overlies et jusqu’au 19e siècle le bloc de terres et de prairies sis à l’est de la ferme et du moulin portaient la dénomination de Petit et Grand Overlies. Il s’agit de l’espace limité approximativement par l’avenue Van Volxem, la rue du Feu, les rues Saint-Denis et des Carburants actuelles.
Assisté de son frère Franco Bule, Arnould d’Overlies fit donation en 1219 à l’abbaye de la Cambre, des terres et du moulin de Quakenbeke d’accord avec son suzerain Leon d’Aa, châtelain de Bruxelles, sous condition de payer à ce dernier un cens de 4 deniers à la Saint André, 30 novembre (AEC chartrier n° 5566). Auparavant, le Duc de Brabant Henri I avait cédé à la Cambre (acte de l’an 1214) des terres d’une contenance de 4 bonniers sises à Quakenbeke (AEC n° 5566).
De son côté le châtelain Walter d’Aa donna en 1221 à cette abbaye 5 bonniers et demi de terres à Quakenbeke ainsi que le 1/6 du moulin de ce nom. Les droits sur les 5 autres sixièmes avaient été acquis de Razo de Quakenbeke et furent cédés à l’abbaye de la Cambre par Henri, fils de Luzaire de Buesdal, qui les tenait en fief de Walter d’Aa. Ceci solutionna les litiges antérieurs car tous ceux qui auparavant avaient fait valoir des prétentions sur ce bien y renoncèrent en faveur de l’Abbaye de la Cambre en présence de Henri d’Aa, maire de Walter.

Le moulin de Quakenbeke existait donc déjà avant 1219. A l’époque c’étaient les ducs de Brabant qui accordaient l’autorisation de construire. Un moulin en ce temps lointain était un rouage non négligeable dans l’économie locale, puisqu’il rendait le hameau plus ou moins tributaire de son existence. Comme sans doute beaucoup de ses congénères celui de Quakenbeke connut des tribulations inhérentes à sa situation topographique.

La Geleysbeek qui prend sa source à Uccle au Vivier d’Oie (Diesdelle) et dont les eaux actionnaient notre moulin forestois avait anciennement un débit volumineux attesté par toute une série de moulins disséminés le long de ses rives. Cependant le déboisement progressif de notre commune et des parties de la lisière occidentale de la forêt de Soignes influença déjà la régularité du débit du cours d’eau dès le 14e siècle au point que pendant les périodes sèches de l’année les meuniers se virent obligés de conclure entre eux des accords amiables. C’est dans ces circonstances que l’Abbaye de la Cambre renonça, le jour des Saints Simon et Jude, en 1322 à ses droits sur le moulin de Quakenbeke « Afin de faciliter la marche des moulins du Nieuwmolen » sur la Senne, dont l’activité justifiait à ce moment la mise en action de plusieurs roues. A. Wauters, à qui nous empruntons ce détail, écrit que le moulin de Quakenbeke était situé plus en amont également sur la Senne. Ceci est inexact mais il s’agit d’une simple inadvertance de l’éminent historien puisque sur la carte publiée en tête du tome I de l’Histoire de Bruxelles il a fort bien situé le moulin sur la Geleysbeek. On peut déplorer toutefois que l’inexactitude fut reproduite ultérieurement par plusieurs auteurs.  (…)

En compensation de l’abandon des droits de l’Abbaye de la Cambre sur le moulin, le duc de Brabant Jean III accorda à ce couvent l’exemption de toute corvée pour sa ferme de Quakenbeke contigue au moulin. Pour des facilités d’exploitation divers échanges de terres et de fermes eurent lieu entre les Abbayes de la Cambre et de Forest dont certains biens s’interpénétraient (AEC n° 5696). C’est certainement au cours de ces échanges, qui se firent au XIVe siècle, et qui avaient pour objet de rapprocher les abbayes propriétaires des fermes exploitées à ce moment par des serfs en compte partagé, que Quakenbeke devint propriété du Monastère de Forest.

Le moulin traversa-t-il triomphalement les siècles ou connut-il l’existence cahotée de la plupart des entreprises humaines ? Quels éléments favorables ou défavorables influencèrent cette activité ? Comment les divers occupants exploitèrent-ils notre première usine forestoise ?
Essayons de répondre à ces diverses questions.

Après l’arrêt de son activité en 1322 on retrouve le moulin dix lustres plus tard comme moulin à huile. L. Verniers nous dit à ce propos assez laconiquement qu’ »un acte d’acquisition de mars 1372 cite l » « slachmolen ». Ce terme signifie : moulin à battoir ou à frappe. L’opération de l’extraction de l’huile s’appelait en flamand : olieslagery. La graine était broyée entre les meules du moulin et réduite en bouillie. Le battoir servait à triturer la pâte oléagineuse. Un moulin à huile était parfois actionné par des chevaux, d’où aussi le nom de « Rosmeulen » qu’on lui donna dans ce cas.
Les moulins à huile payaient au moyen âge un fermage en nature comprenant toujours une certaine quantité de « raepkoeken, raepbroden, ou robbrooden » (orthographe des anciennes archives), les tourteaux de navette ou de colza constituant le sous-produit sortant des presses après l’extraction de l’huile. Ils étaient utilisés comme nourriture pour le bétail et surtout pour les vaches laitières dont on obtenait ainsi un lait très riche en matières grasses. On les destinait aussi parfois au fumage des terres. Le nombre de tourteaux à fournir par le meunier de Quakenbeke était variable. En 1483 400 pièces ; en 1507 100 ; en 1555 200. Plus tard, cette obligation fut supprimée car les tourteaux de colza ou de lin devinrent une marchandise que chaque fermier put obtenir à volonté grâce à l’essor que prit la culture du lin et du colza et la multiplication des moulins à huile qui s’ensuivit. La frappe du tourteau de colza fut réglementée au point de vue du poids par une ordonnance de 1569 du Magistrat de Bruxelles exigeant « de ceux qui s’occupent à l’intérieur de la ville de battre de la graine de navette, de colza ou de lin et de faire de cette graine des tourteaux, que ces tourteaux devaient peser ce qu’ils pesèrent toujours anciennement (10 à 5 kg.). Le Magistrat crut devoir ajouter cette vérité de La Palice « afin que les acheteurs de la ville et ceux de la campagne ne soient pas lésés ». Evidemment.

Quoique la destination de moulin de Quakenbeke ait été à l’origine la mouture du grain il fut affecté très tôt au traitement des graine oléagineuses, activité qu’il conserva pendant près de 4 siècles. Cette activité est lié au développement de Bruxelles comme chef-lieu du Brabant, dont la bourgeoisie demande avec plus de confort plus de lumière (lampes à huile) plus d’huile végétale pour la cuisine et pour la fabrication de savon répondant à des besoins plus grands d’hygiène corporelle. 
Le moulin de Quakenbeke ne revint à sa destination première de mouture des blés qu’à partir de 1714 jusqu’à sa suppression à la fin du XIXe siècle. Toutefois il n’est pas impossible qu’il ait fait les deux opérations ainsi qu’il est mentionné plus loin.

Sans donner d’autres précisions, L. Verniers écrit que le moulin de l’Oude Vorstweg fut moulin banal, c’est-à-dire celui auquel les villageois d’une certaine circonscription, en l’occurrence celle indiquée par le Monastère, étaient tenus, sous peine d’amende, de faire moudre leurs céréales, moyennant une redevance, souvent usuraire, appelée banalité.
L’âme de cette activité était le meunier : de molder ou slachmolder, comme on l’appelait jadis, aidé de ses proches. C’étaient des travailleurs généralement d’un commerce facile de par la nature même de leurs occupations et dont l’humeur finissait par devenir aussi égale que le ronronnement saccadé et rythmique des meules de leur moulin. La nature nonchalante de ces travailleurs est d’ailleurs proverbiale. Le vieil adage forestois : faire ses pâques avec les meuniers signifie : arriver bon dernier.

Le plus ancien meunier connu de Quakenbeke est Moen (Edmond) Baers. Un registre de l’Abbaye intitulé « cheyns van den jaere 1416 » (AEF n° 7324) mentionne qu’en 1421 il souscrivit un bail de 6 ans, document très laconique : houdt de slachmolen te Quakebeke te pachte (voor) eenen termijn van ses (jaeren) gelyc de vorwerde int pachtboec van der eerne verclaren, ende gheeft elx jaers den god ( ?) XV corne vranxe etc.. A son entrée dans un moulin reconstruit ca run texte de 1411 (AEF n° 7324) nous apprend qu’à ce moment un certain Willem Merchans loua un bien rural à l’endroit où se trouvait précédemment le moulin à huile (eenre hofstadt dair de slachmolen placht te stane), une destruction venant s’ajouter à combien d’autres ?

Au meunier Baers succéda en 1427 Louis Belleken (AEF n° 7100 p. 78). Notre pays venait de connaître l’autorité de Philippe le Bon. On sait que le prince Philippe, très ambitieux, réussit par diverses manœuvres à s’emparer du Brabant compris dans les biens de sa nièce Jacoba de Bavière, veuve de Jean IV (1430). Nos régions en particulier connurent de ce fait une période de tranquillité relative que nos villageois purent mettre à profit. L. Belleken souscrivit le 10-7-1427 un bail de 12 ans, document qui nous indique de quel genre d’habitation il disposait. Les bâtiments dont il devait assurer l’entretien étaient couverts de chaume mais l’Abbaye lui fournissait la paille, les lattes et les ferrailles nécessaires. Il avait aussi la charge d’entretien des diverses mécaniques du moulin (cammen, spillen, dwingewercken), obligation qui fut reproduite dans tous les baux ultérieurs. Notons dans les objets qu’il recevait en prêt la dimension de deux grands seaux à huile d’une contenance chacun d’une ½ aune (65 litres). Le meunier Belleken eut à compter avec l’adversité. Dès les premières années du bail le moulin subit une nouvelle destruction. En 1434 on mentionne en effet un bien rural « sis à l’endroit à côté duquel se trouvait jadis le vieux moulin à huile sur la digue de l’étang entre la vieille maison meunière et les biens des enfants de Weyn Rullemans » (traduction doss. 7100 p. 4 AEF). Le moulin fut reconstruit en 1436 et Belleken vint le réoccuper à raison de 19 peeters d’or par an.

Gheert Devrieze lui succéda le 27-10-1441 (AEF n° 7100). Jean de Becker fut le meunier suivant en 1455. En plus des conditions habituelles il devait exécuter une corvée de chariot avec chevaux (AEF n° 7105 p . 115). De Becker était épicier-charcutier (vettewarier). Il manipulait le beurre, les graisses, etc., mais il ne supportait pas les matières grasses. C’est pourquoi il préféra venir se plonger dans les huiles et les tourteaux. En langage courant cela s’appelle tomber de Charybde en Scylla. Il est vraisemblable que le prénommé ait pris à son compte un sous-traitant car lorsqu’il renouvela son bail en 1461 « 15 daghe in Aprille », l’acte mentionne toujours la profession de « vettewarier ». Il fut exempt de la corvée de chariot mais dut payer 3 peeters d’or en plus. De la part de l’Abbaye ce n’était pas mal calculé du tout.

Dans les conditions faites au meunier Claes Vandenhovele, succédant à De Becker en 1473, on remarque le souci de la Dame Abbesse relativement aux inondations. Celles-ci durent souvent de révéler néfastes pour nos villageois car la Révérende Dame se réserva le droit d’immobiliser le moulin lors des grandes eaux en tirant le panneau de fond de l’écluse meunière « sal mogen trecken tgrondlaet van den waestgat » et d’évacuer ainsi les têtes de crues. Dans la période critique pour les terres ensemencées, c’est-à-dire entre Pâques et le Pentecôte, elle pouvait laisser le panneau ouvert pendant 2 jours et 2 nuits moyennant indemnisation du meunier pour l’immobilisation de ses roues (AEF n° 7105 p. 116). Plus tard on estimera que pour pouvoir être indemnisé le chômage du moulin devra atteindre au moins 8 jours, simple détail, mais qui montre que la conjoncture est favorable et que le meunier gagne sa vie. Du fait, lorsqu’à la mort inopinée de Philippe le Beau, survenue en 1506, Charles-Quint, son fils âgé alors de 6 ans, devint notre monarque un temps nouveau est inauguré. Notre pays bénéficie d’un marché agrandi par les immenses territoires espagnols y compris l’Amérique et les Indes, qui venaient d’être découvertes.

Le moulin est loué à ce moment (1507) pour 12 ans au meunier Adrien Vanderschueren, maître de la Table des Pauvres en 1524 et échevin de Forest depuis 1526 (gr. Scab. 3326). Sa fille Jacquemine épousa Henri Langevelt, fils de Gilles, qui succéda à son beau-père en 1555, année au cours de laquelle, fatigué du pouvoir, Charles-Quint abdiqua en faveur de son fils Philippe II. Henri Langevelt devint échevin de Forest, et le 1-11-1561 il fit comme « Huisarmenmeester » devant le maire du village le serment de gérer avec dévouement les biens de la Table des Pauvres comme il gérerait ses biens propres. Le meunier Langevelt et son épouse vécurent une période profondément remuée par les troubles sociaux et religieux et par les exactions de la soldatesque espagnole. Ces « furies » atteignirent leur paroxysme en 1578. « Il na passait pas de jour que les Espagnols ne fissent des « incursions » dans les villages des environs de la capitale et n’y fissent prisonniers des paysans qu’ils pouvaient n’épargnant même pas les petits enfants, les fils ou les filles » (HF p. 124).
Les bandes de calvinistes ne se montrèrent pas moins cruels. Ils incendièrent l’Abbaye de Forest et presque tout le village en 1582. Le moulin de Quakenbeke fut détruit de fond en comble après que le malheureux Henrike Langevelt eut obtenu de la Révérende Abbesse, Françoise de la Douve, « en raison de son grand âge » une prolongation de son bail pour le restant de sa vie (AEF 7131).

Le moulin ne se releva de ses ruines qu’en 1617 après qu’il fut resté à l’abandon pendant de longues années (« welcken molen nu onlanx ierst is wederomme vuyten fondamente opgemaeckt, naer dat hij menichte van jaeren hadde onder de voeten gelegen » (AEF n° 7208). La plupart des terres cultivées étaient devenues  des « wildernissen » ou bien envahis par des hordes sauvages. On aura par l’exemple suivant une idée de l’état d’abandon dans lequel était tombé à ce moment le village de Forest.          
Dans la petite « Meulekasseike » face au moulin les arbustes avaient poussé au milieu du chemin, rendant tout passage avec chevaux et charrettes impossible. Il fallut une action collective des échevins et du maire Devleeschouwere pour remettre le chemin en état. Ce n’était d’ailleurs plus un chemin mais un petit bois, à tel point qu’on décida de ne porter la hache que sur les arbres du milieu, entravant le passage des véhicules « heeft doen affhouwen oft aft cappen nyet alle de boomen die opde straete stonden ende waeren belettende die passage van wagens ende kerren » (AEF n° 7208).

Ce fut Pierre Stockmans qui reprit la meunerie après restauration en 1617 mais il ne l’occupa que pendant  4 ans. Son successeur Hans Verlinden fut lui-même remplacé 6 ans après par Henri Verborght ou Vanderborght. Celui-ci quitta le « corenmolen » déjà après 3 ans pour le remettre à Martin Messains ou Messians. Nous ignorons la cause réelle de ces départs prématurés. Mais nous notons que l’exploitation est déficitaire et que la plupart des meuniers restent à leur départ redevable d’un arriéré de loyer important.  La meunerie se débattait dans d’indéniables difficultés. L’Abbaye stimulée par les pouvoirs publics se montrait pourtant compréhensive et accordait des modérations.

Les successeurs Gillis Speltens en Jean Van Boxsens louèrent l’établissement « in solidum » ou solidairement en 1638. Jean Van Boxsens, qui entretemps s’était marié, continua la meunerie pour son compte en 1649 et lorsqu’il décéda en 1654 sa veuve, née Schoeps Claesyne (Nicole) poursuivit l’exploitation après s’être remariée la même année avec l’infortuné Martin Cool, qui mourut déjà l’année suivante. Nicole Schoeps ne jeta pas la manche après la cognée. Le 26-7-1657 elle prit un nouvel époux en la personne de Pierre Servaes, qui avait à ce moment 29 ans. Ce Pierre Servaes est parmi les meuniers de Quakenbeke une des personnalités les plus attachantes. Il connut les jours les plus sombres de l’histoire du village mais ne se laissa jamais abattre par le destin. Aidé de se courageuse épouse, et plus tard de son fils François, il tint le gouvernail contre vents et marées, au cours d’un terme mémorable de 53 années d’exploitation.  C’est sous sa gestion que l’on vit s’amonceler dans le ciel politique des nuages menaçants.

Les invasions françaises de 1667 furent le signal de calamités de toutes sortes qui s’abattirent sur nos malheureuses régions et dont nos populations rurales payèrent un lourd tribut. En l’espace de 14 ans, de 1683 à 1697, le village de Forest fut envahi six fois, soit par les militaires amis ou ennemis, soit par les populations fuyant devant les armées. Ces fuyards fourragèrent ou plutôt ravagèrent totalement les cultures, les vergers, les bois. Nous n’avons pas de données précises au sujet des déprédations qui se commirent à Quakenbeke mais on ‘imagine aisément ce qui fut en ces temps pénibles, la vie dans notre entreprise forestoise. Car pour les habitants des campagnes l’état de guerre signifiait toujours la même chose : logements, réquisitions, violences, pillages, pertes de récolte et autres dommages anéantissant en peu de jours le fruit de toute une année de travail. Ce n’est pas sans raison que la période de l’occupation de notre pays par les armées de Louis XIV fut appelée le siècle de malheur. Les temps étaient devenus si incertains que les villageois devaient eux-mêmes assurer la sécurité de leurs personnes et de leurs biens. Ils devaient s’attendre à tout moment à la visite de bandes armées, de brigands, qui, profitant de l’obscurité, venaient par la torture extorquer les deniers si péniblement amassés. Notre ferme-moulin devait d’autant plus apprécier les avantages de la paix que dans les moments de calme elle était en quelque sorte privilégiée, se suffisant à elle-même pour tout ce qui concernait l’alimentation. Elle consommait sa propre production de pain, beurre, œufs, viande, laitage, fruits et légumes et de grand matin les meules chantaient à un rythme joyeux la chanson du mouvement et de la joie de vivre. Grâce à une planche de Jacob Neefs, publiée par Sanderus dans « Choreographia Sacra Brabantiae » édition 1659, il nous est conservé un croquis du moulin.

Le meunier Pierre Servaes siégea jusqu’en 1682 au banc échevinal de Forest. Il était aussi doyen et syndic ou maître d’amendes (boetmeester) des nations de la ville de Bruxelles : chaque corporation y élisait un syndic, qui était son porte-parole auprès du Magistrat ou du Chancelier du Brabant. En 1701 et 1702 Servaes était le fermier percepteur des dîmes. Il était propriétaire de divers biens fonciers, dont l’auberge « Den Coninck van Spagniën » en face de l’église et lorsqu’il mourut à l’âge de 81 ans il reçut les honneurs qu’il avait largement mérités par une vie d’honnêteté et de travail. On l’inhuma au sanctuaire de Notre-Dame dans l’église de St-Denis, sa paroisse. Une dalle funéraire sous la tour, le rappelle à notre souvenir : « Hier leydt begraeven Petrus Servaes in zijn leven gewesene deken ende boetmeester van de natiën der stadt Brussel, oudt 81 jaeren, sterft den 26-7-1709 ». Il est à noter que c’est par erreur que cette pierre tombale indique la date du 26 juillet. D’après les registres communaux, P. Servaes décéda le 24-7-1709, le 26 juillet étant la date de sa sépulture : Obiit Petrus Servaes molitor qui 26 eiusdem sepultus est in templo forestensis in Sacello Dive Virginis.

François Servaes succéda à son père en 1709 mais remet déjà la meunerie après 5 ans. Il faisait partie du Magistrat de Bruxelles où il appartenait à la nation de St-Jacques. La corporation des meuniers avait pour armoiries l’emblème ci-contre. François Servaes était né à Forest le 28-4-1660, parrain Francis Eydens, marraine Anna Vanderborcht. Il avait hérité de ses parents les qualités d’honnêteté, de travail et de ténacité. Sa popularité et ses qualités d’administrateur le portèrent plus haut dans la hiérarchie sociale. Par une chaude journée de juin 1713 tard dans la soirée, à la « St-Jansdag » (24 juin) on vit arriver dans l’ »Oude Vorstweg » venant de Bruxelles, plusieurs calèches qui s’arrêtèrent devant l’entrée cochère avec arcade en anse de panier du vieux moulin de Quakenbeke. Il y avait de la joie dans ce groupe et lorsque les voitures eurent pénétré dans la cour de l’immeuble, François Servaes en descendit pour recevoir les effusions de ses proches. Il venait d’être promu «bourgmestre des nations de la ville de Bruxelles, charge très méritoire, pour un enfant de Forest. Il était à ce moment dans sa 53e année et fut bourgmestre pendant 4 ans. Il ne céda son poste que pour accepter celui plus assujettissant encore de receveur (rentmeester) de la ville de Bruxelles, fonction qu’il exerça pendant 11 ans jusqu’à sa mort survenue à l’âge de 68 ans, le 31-10-1728.

François Servaes avait épousé Catherine Van den Daelen. Il eut 5 enfants : Guillaume 1693 ; Catherine 1697 ; Marie-Albertine 1699 ; Jean-François 1700 ; Pierre 1703. Le fils Jean-François fut curé-chapelain de l’église St-Géry à Bruxelles (arch. Ville de Bruxelles n° 3407).

Théodore Aerts reprit du « burgemeester Servaes » l’exploitation du moulin à partir de Noël 1714, à la suite d’une taxation par experts des appareils divers en fer et en bois (AFF 7582). A en juger mar leurs procès-verbaux des 22 et 26 juin 1714, l’entreprise était assez importante. 
Le moulin qui sous Servaes père était mentionné comme moulin à huile fait maintenant la mouture des grains. Il comporte deux roues intérieures traitant l’une le seigle, l’autre le froment, ce qui laisse entrevoir la possibilité d’une double affectation antérieure : les grains et l’huile. Les taxateurs nous apprennent que pour le « corenmolen » la meule tournante (den looper) avait une épaisseur de 10 ¼ pouces et la meule fixe (den ligger) 3 ¼ pouces. Pour le « terwemolen » ces mesures étaient respectivement 8 ¾ et 2 ¾ pouces (1 pouce = 28 à 30 cm.). C’était un vieil usage en meunerie de faire à l’entrée du bail une taxation des meules et accessoires mobiles « de ruerende wercken ». A la fin du bail on faisait une même taxation et le meunier  sortant payait une indemnité par pouce d’usure, ou recevait une indemnité par pouce d’excédent, si au cours du bail les meules avaient été renouvelées. A Quakenbeke celle-ci était fixée à 12 fl. du Rhin par pouce, dès 1637 (AEF dossier 7133).

Au cours des dix années de gestion du meunier Th. Aerts l’exploitation se révéla désastreuse. Il quitta Quakenbeke à la St. Jean 1724 et resta débiteur de 900 florins, soit un arriéré de loyer de 2 ans 3 mois. Après qu’on eut saisi tout son avoir : les chevaux, le matériel, les marchandises, sa part dans les récoltes, ainsi que 100 fl prix de réalisation d’une petite ferme, il resta redevable de 710 – 8 fl, somme qui fut considérée comme irrécouvrable. C’était la ruine complète (AEF reg. 7468 à 7473).

François et Henri Herinckx reprirent solidairement l’exploitation en 1724. Ils furent les meuniers pendant 46 ans. Henri du moins, car François se retira en 1745 pour exploiter le moulin à papier « op de beek ». Henri Herinckx était échevin depuis 1756. C’était un bourgeois cossu (iene die er werm inzit, comme on dit en patois local !) Il se retira des affaires à la Noël 1770 pour remettre Quakenbeke à François Verheylewegen, meunier, venant de la baronnie de Carloo (Uccle-St. Job). Les Verheylewegen furent les derniers exploitants de l’ancien régime : François pendant 25 ans, son fils Henri depuis le 12-9-1795. A la veille de la dispersion des biens de l’Abbaye de Forest ma meunerie comprenait des terres et des prés d’une contenance totale de 8 b 2 j 33 verg. Comme c’était souvent le cas, Henri Verheylewegen était donc autant fermier que meunier. C’est sous sa gestion que survinrent les événements qui amenèrent l’expropriation des biens ecclésiastiques et la vente du moulin. Soit dit en passant, ces ventes se firent sans grands égards pour les droits des fermiers ou locataires, ni des pertes qu’elles allaient occasionner à l’économie locale. C’est ainsi que les étangs furent vidés et le poisson offert en vente publique le 9 ventôse an V ( 27-2-1797). Le commissaire vendeur Fébus assisté du délégué municipal Van Haelen Mathias, se présentèrent à Forest à 10 h du matin et avaient déjà vendu 15 lots pour le compte de l’Autorité Républicaine lorsque le meunier Henri Verheylewegen vint exciper de ses droits de possession et fit arrêter la vente (AEF dossier 7571). Les Verheylewegen étaient une vieille famille de fermiers de l’Abbaye de Forest. Ils étaient depuis la fin du 16e siècle les tenanciers de la ferme d’Elishout à Anderlecht.

 Ci-contre une vue de Quakenbeke d’après la carte du géomètre Everaert en 1790. Le moulin qui, depuis près de sic siècles avait été propriété ecclésiastique, fut déclaré bien national par décret du 14 fructidor an IV (1-9-1796) de la République Française. Ce décret supprima les établissements religieux en Belgique et ordonna la confiscation de leurs biens au profit du Trésor. Quakenbeke fut vendu aux enchères le 13 ventôse an V (4 mars 1797) et adjugé au sieur Samson pour la somme de 84.000 livres. Suivant le lotissement français, il contenait avec la ferme, ses dépendances ainsi que les grans et petit étang cités plus haut 17 bonniers, 1 journal, 43 verges, consistant principalement en prairies basses (beempden). Nous le retrouvons au début du siècle suivant en possession du sieur Van Volxem (BR cartes et plans IV 274)

De la période succédant immédiatement aux évènements ci-dessus, consacrons une mention spéciale au meunier Leten Jean François, fils de Stéphane. Il avait épousé le 8 janvier 1809 Catherine Vligen, veuve du meunier précédent Henri Verheylewegen, décédé le 22 Brumaire an VII (13-11-1798). Leten était un homme ponctuel et actif ayant un très haut souci de ses devoirs de citoyen. Il fit partie du premier Conseil Communal institué sous le régime hollandais et entra en fonctions le 17-6-1818 sous le mayorat du comte Martin Cornet de Ways-Ruart. Le Conseil Communal le proposa ensuite à la charge d’échevin de l’Etat Civil, dont il prit possession le 20-6-1819 et dont il s’acquitta avec un courage et une abnégation absolus. Il s’occupa de l’état-civil, de l’église paroissiale, de la surveillance des travaux, de l’entretien des voies de communication, des coupes de bois, etc. Les documents le montrent partout présent.  Lorsque le 14 novembre 1829 le mayeur Comte Cornet de  Ways-Ruart cessa de présider les séances du Conseil Communal, ce fut le premier échevin Jean Leten qui reprit cette charge jusqu’au 1-5-1830 (dernière réunion du Conseil avant la Révolution belge).

Divers indices montrent qu’avec le temps le moulin eut à compter avec des difficultés nouvelles. La Geleysbeek traversait le centre du village du sud au nord et dès le XVIIIe siècle ont commencé à s’installer le long de ses rives de modestes entreprises, puis des établissements de plus en plus importants, qui ont fait de Forest le grand centre industriel qu’il est aujourd’hui. Situé à la sortie du village, le moulin se trouvait forcément désavantagé, l’utilisation de l’eau de la Geleysbeek engendra des litiges qui maintes fois se tranchèrent à l’intervention du pouvoir judiciaire.

Les moulins à eau et à vent eurent au surplus, à partir du XIXe siècle, à soutenir une concurrence mortelle de la part des moulins à vapeur, en sorte que la décadence de Quakenbeke s’avéra finalement inévitable. Au recensement de 1855 il n’est plus que le seul moulin forestois. Il est encore cité en 1884 mais aux statistiques de 1895 il a cessé d’exister. A cette époque les deux meules restaient remisées, telles des reliques, dans l’ancien local de mouture. La roue motrice extérieure avait disparu, mais il restait en bordure de la rue St-Denis comme seul vestige de l’activité d’autrefois le garde-fou avec ses pilastres et assises en pierre de taille. La chaussée formait en aval du moulin vers Bruxelles un raidillon connu dans le langage populaire sous l’appellation de « het kasseike van de meule ». Au bas de cette montée un petit pont faisait dériver les eaux de la Geleysbeek à droite de la chaussée.

Le déclin laisse toujours une impression pénible, mais il s’en faut que nous ayons à terminer sur une note aussi pessimiste. Quakenbeke avait un prestige à défendre et il parvint, vers le dernier quart du siècle écoulé à redorer quelque peu son blason et à conquérir même comme station d’hiver une certaine renommée dans l’agglomération bruxelloise. Quelques vieux Forestois se rappellent encore les jours de patinage sur le « Lac de Forest » obtenu grâce à l’inondation de l’ancien grand étang dont il a été question. (…)     

Literatuur

Bibliothèque royal / Koninklijke Bibliotheek, Cartes et plans / kaarten en plannen, IV, 274.
J.P. Vokaer, "Par les rues de Forest", Imprimerie Cantrin 1954.
Alphonse Wauters, "Histoire des environs de Bruxelles", Brussel, III
M.A. Duwaerts e.a., "De molens in Brabant", Brussel, Dienst voor Geschiedkundige en Folkloristische Opzoekingen van de Provincie Brabant, 1961;
Herman Holemans, "Kadastergegevens: 1835-1980. Brabantse wind- en watermolens. Deel 1: arrondissement Brussel-Hoofdstad", Kinrooi, Studiekring 'Ons Molenheem", 1989;
Paul Bauters & Marc Villeirs, "Les moulins à eau et à vent de Woluwe-Saint-Lambert et de la région bruxelloise. Histoire et technologie / Water- en windmolens van Sint-Lambrechts-Woluwe en van het Brussels gewest. Geschiedenis en techniek", Woluwe-Saint-Lambert/Sint-Lambrechts-Woluwe, 1996 (Musée communal de Woluwe-Saint-Lambert, cahier n° 2 / Gemeentelijk museum van Sint-Lambrechts-Woluwe, tijdingen n° 2).
Henri Herdies, "Pages forestoises d'histoire et de folklore, 1958, p. 48-62.
Info Wim van der Elst, voorzitter Laca, Laken, 11.11.2013.

Overige foto's

<p>Quakenbeekmolen<br>Kakenbeekmolen</p>

Tekening van G.H. Degroeve naar figuratieve kaart van landbouwer G. Couvreur, 1736 (Kon. Bibl., ms., nr. 13538)

<p>Quakenbeekmolen<br>Kakenbeekmolen</p>

Fragment van de kaart in Sanderus, 1659.

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Laatst bijgewerkt: donderdag 14 november 2013

 

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